Camila
5.8
Camila

Album de Camila Cabello (2018)

Half of my heart is in Camila

Tout commença au sein d'un Girls Band comme il en existe plein : Fifth Harmony (vous reconnaitrez facilement notre Camila sur les photos, c'est la seule à ne pas avoir un bonnet E, et sur "Work From Home" c'est celle qui propose le couplet le plus intéressant avec sa voix pitchée et son léger autotune qui tranche avec la performance classique de ses camarades). En décembre 2016 Camila Cabello saisit une opportunité, quitte ses copines (qui garderont leur alias malgré leur passage à 4) et se lance dans le vertige du solo. S'ensuivent collaborations d'un soir avec Shawn Mendes, Machine Gun Kelly, Pitbull, Travis Scott, Major Lazer, Quavo... Il ne manque plus qu'un tube qui soit le sien propre, où elle n'est plus "qu'une" invitée, et il se présente sous la forme de "Havana" qui défonce la concurrence dans les charts. À raison : les accords du vieux piano poussiéreux et à moitié désaccordé, la plainte sensuelle de Camila qui répète son désir nostalgique sous la forme d'une mélodie grave et sensuelle, ces trompettes madre de dios... et même un feat de Young Thug qui nous offre des chœurs perchés et un jouissif couplet dans la bouillie freestyle autotunée qu'on lui connait. Voilà, maintenant on est sûr que tout le monde connait Camila, même Barack kiffe, le train de la hype file à la vitesse d'un shinkansen sans freins.


Maintenant il ne manquerait plus que l'album soit bon par dessus le marché. Sortie prévue pour début 2018, pour bien (?) lancer l'année et afficher sa volonté de prendre un nouveau départ après les Fifth Harmony, qui s'amusent à la trasher lors de leurs concerts, l'aigreur se sent jusqu'ici. Mais qu'importe, Camila (l'album) est là et si j'en juge par mon taux inquiétant d'écoutes fiévreuses par jour depuis vendredi : il est bon. Très bon même. Camila a choisi un écrin instrumental et une production qui sont tout à fait dans mes goûts en matière de pop mainstream. La première influence à me frapper, curieusement, est celle du dernier... Justin Bieber, Purpose (qui est un excellent album et croyez-moi j'en fus le premier étonné). La présence de Benny Blanco parmi les producteurs de l'album y est sans doute pour quelque chose, lui qui était responsable de la ballade "Love Yourself", qui avec le recul semble la grande soeur des ballades tissées sur Camila, avec l'ajout de petits bitoniaux électropop super catchy qu'on retrouvait un peu partout dans Purpose (et qui font leur apparition ici sur un morceau comme "Real Friends"). Choix très judicieux à mon sens, à mettre au crédit de la cubaine qui ici propose un album finalement très dépouillé, qui devait d'ailleurs à l'origine se nommer The Hurting. The Loving. The Healing. et raconter une phase de transition douloureuse dans sa vie, une ascension "des ténèbres aux lumières".


Un ton qui semble mettre à mal ceux qui attendaient un disque rempli de "Havana". En effet, pour ceux-là (et pour moi-même au premier abord), l'album paraitra redondant. Camila écrit des paroles intimes (tragiques et amères parfois comme sur "Consequences" qui parle d'amour et de violence domestique avec une tendresse qui mettra à mal les plus manichéens d'entre vous) et privilégiera plus souvent la pudeur d'un piano aux beats reggaeton. Il suffira de quelques écoutes confiantes pour se convaincre que ça n'était pas plus mal et que Camila est tout à fait convaincante dans ce registre. Et ça ne retire rien à la pure joie délivrée par les tracks les plus optimistes : le reggaeton un peu bizarre mais super fun de "She Loves Control", l'audacieuse "Never Be the Same" qui pourrait être extraite tout droit du dernier Charli XCX avec son pitch artificiel qui lui permet de chanter à une hauteur improbable avec une facilité toute digitale (et un rendu qui me fascine, coucou PC Music), ou la bilingue "Inside Out", son piano sautillant et son steel drum des îles.


On regrettera simplement que les trois dernières pistes de Camila peinent à offrir un final à la hauteur des deux premiers tiers, avec son "Something's Gotta Give" qui fait un peu ballade tire-larmes à Oscars, ou "Into It" qui en matière d'électropop pâtit en comparaison du début du disque. Mais une fois ces doléances posées, on saluera une dernière fois l'ingéniosité de ce petit album qui sait utiliser autotune, vocoder et autres bidouilles vocales de studio avec parcimonie, pour donner un timbre alien à certains chœurs (parfait exemple sur "All These Years"), réhausser digitalement certaines mélodies... Et que les ingrats déçus du nombre de ballades au mètre carré soient rassurés ; maintenant que Camila a fini de coucher sur bandes audio ces souffrances elle ne veut plus entendre parler des ténèbres. Vous l'aurez peut-être votre album plein de bangers, en attendant celui-ci malgré ses défauts a son caractère, ses tubes et promet monts et merveilles pour la suite.

TWazoo
7
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Cet utilisateur l'a également mis dans ses coups de cœur et l'a ajouté à ses listes 2018 en musique après la cuite fortuite où j'ai pris la fuite devant un inuit et sa truite gratuite et Les meilleurs albums de 2018

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le 14 janv. 2018

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T. Wazoo

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