Sufjan Stevens est de retour. Un retour désarmant. Avec Carrie & Lowell, Sufjan Stevens nous ressort un son folk doux, tout en arpèges de banjo, guitares et piano, bien loin des nappes électroniques (pourtant encore discrètement présentes) du quasi polémique Age of Adz . Un retour au sources donc, mais teinté d'une maturité musicale qui sied à la thématique de l'album : un regard aussi impudique que triste et tendre sur ses parents. Sa mère qui l'a abandonné, son beau-père qui fut là comme il pouvait...
Contrairement au mythique Illinois qui a fait la renommée de l'artiste, Carrie & Lowell évite l'écueil habituels des morceaux passe-plat qui "forçaient" l'écoute d'une traite pour mieux insister sur le principe de "l'album concept". Ici, chaque morceau à sa cohérence, sa propre beauté mélodique, ses arrangements ciselés, une énième variante de la voix éthérée et haut perchée de l'artiste... Death With dignity ouvre magistralement l'album, le reste n'est qu'une succession de petits bijoux délicats. J'ai personnellement un coup de cœur particulier pour Fourth of July, à la rythmique et diction incantatoire...
Si Carrie & Lowell peut s'écouter uniquement pour sa part instrumentale (dans la pénombre, au casque de préférence), prêter attention aux textes transcende l'album. Sufjan Stevens jette un regard sans compromis sur son passé et sur la (sur)vie de sa mère, fantôme enveloppant l'auditeur, teinté d'une amertume noyée dans un pardon non-dit.
A quarante ans, Sufjan Stevens signe un album qui peut légitimement rebattre les cartes quant à ce qui sera un jour considéré comme son album phare. Après une longue absence, il rassure au moins son auditoire, son mutisme ne dissimulait aucune perte de talent, bien au contraire.