Meshuggah, ou l'antithèse de l'efficacité live. Prenez un morceau formaté pour la radio. Un morceau efficace, épique, avec une mélodie qui entre dans la tête, et un riff qui fait bouger les fesses avec ardeur. Ensuite, rajoutez un petit texte simple qui entre immédiatement dans vos synapses et s'y imprime, et devient lancinant.
Meshuggah, c'est tout le contraire. Meshuggah est le cauchemar de l'amateur d'efficacité rapide, de prêt à digérer.
La mélodie? Elle a été remplacée par le bourdonnement rugueux des guitares sous accordées, qui vont jouer avec facétie au milieu des infrabasses. Fini la rythmique agréable qui prend ton corps par la main pour le faire danser. Ici les riffs s'allongent, se rétractent, se distendent et se brisent en permanence. Les boucles se superposent, se doublent, jouent un moment puis s'abandonnent alors que quelque chose d'autre prend le dessus. Le texte? Des mathématiques, de la philosophie, tout un tas de mots compliqués qui viennent te tirer de ta candeur délicate pour te parler de froideur, de concept, d'idées abstraites pensées par un être qui peut trouver de la beauté dans la courbe parfaite d'une hyperbole. Tout s'imbrique, bascule, se brise, s'assemble sans se préoccuper de la notion du temps, de l'espace ou de la physique élémentaire. Meshuggah est ici plus qu'une horloge cassée. C'est une horloge qui peut tourner à l'endroit, à l'envers, les deux en même temps. Ou alors aucun des deux, mais tourne quand même. Messhugah ne te brisera pas les cervicales, pas ici. Ne cherche pas le heandbanging, tu seras pas dans les temps, de toute façon. Un album ardu pour le néophyte, un album ardu pour tout le monde. Un album pour te perdre, complet. Meshuggah invente ici le psychédélisme réfléchi, pensé, construit. On déteste toujours un peu Meshuggah, on adorera peut être dans le futur, ou pas. Mais en tout cas, Meshuggah apporte avec cet album un souffle nouveau au metal, et à la musique en général.