Enregistré circa 1975, en pleine tourmente d'un Label à l'agonie et d'une chanteuse en prise avec ses démons, "Come a Little Closer" aurait pu ne jamais voir le jour. En outre, 1975 voyait se répandre un nouveau style musical, déferlant aussi bien sur les ondes que dans les clubs du monde entier: le disco. Un mouvement de grande ampleur qui éclipsa durablement la Soul et le R'nB dont il se nourrissait pourtant goulûment. De nombreuses chanteuses de Soul (Diana Ross, Candi Staton, Chaka Khan, Esther Phillips etc.) trouvèrent un second souffle salvateur dans l'engouement joyeux que suscitait cette musique nouvelle. Mais contrairement à certaines de ces consoeurs, Etta James ne céda jamais cette mode éphémère.
"Come a Little Closer" est donc naturellement centré sur la soul sévèrement teintée de funk-rock, avec de savoureuses échappées en direction du blues (St. Louis Blues), du jazz New Orleans (Gonna Have Some Fun Tonight) et du Rnb dans tout ce qu'il a de noble (Lovin' Arms, Come a Little Closer). Et au milieu, à cueillir avec délicatesse, une complainte inexprimable, gorgée de pleurs et de lamentations, reflétant au plus près la détresse d'Etta James en ces temps de bataille pour sa propre survie (Feeling Uneasy).
Certains des morceaux ont fait l'objet d'une seule prise ou à peine plus, conférant à l'album une spontanéité rafraîchissante et laissant apparaître de ci de là des aspérités et fissures inespérées dans d'autres conditions d'enregistrement. Etta James prouve ici encore ses incomparables talents d'interprète. A noter les excellentes compositions de Gabriel Mekler et de Trevor Lawrence et dont on aurait pu attendre un travail de moindre qualité concernant un album de commande comme celui-ci.
En conclusion, "Come a Little Closer" est un album extrêmement savoureux, qui s'écoute le sourire aux lèvres mais les poings serrés. Un des meilleures opus d'Etta James avec pour point d'orgue "You Give Me What I Want", "St. Louis Blues" et "Let's Burn Down the Cornfield".