La sombre ombre ombresque où sombrent les ombres que l'on bre des longs bres...
Après 15 ans de télé-crochets francophones divers et variés, on peut faire un constat simple : dans toutes les éditions de la Starac, de la Nouvelle Star et autres X-Factor, il existe UNE figure imposée. Il y a toujours un apprenti chanteur qui veut montrer qu'il est un rockeur, un vrai de vrai, un tourmenté, qui dit aux téléspectateurs, le regard fier, face caméra, « ce soir, je veux vous montrer mon côté sombre » avant d'entonner « Eteins la lumière » d'Axel Bauer dans un magnifique perfecto en cuir.
Et oui, Axel Bauer est ainsi en quelques années devenu la figure de proue du rock français, le vrai, le pur, le dur, le tourmenté. Si t'es pas capable de montrer ton côté « chui-trop-dark », ben c'est pas du rock que tu fais, c'est de la chanson française. La lumière, c'est tout juste bon pour les chanteurs de variét'. C'est peut-être dur à entendre, mais c'est comme ça, si il ne devait y avoir plus qu'une seule règle dans le rock, ça serait celle-là : sois sombre ou tais-toi.
Et ça, Thomas Boulard, l'auteur-chanteur-compositeur de Luke, il l'a très bien compris. Dans l'album « D'autre part », il a réussi à placer le mot « ombre » dans 9 chansons sur 11 (sans compter le bonus track, sobrement intitulé « Shadows » parce que le rock sombre et tourmenté, ça se chante aussi en anglais).
Bref, à part cette monomanie basée sur l'interposition d'un objet opaque entre une source lumineuse et une surface, et cette volonté affichée de concurrencer la rock-star légendaire qu'est Axel Bauer, trève de plaisanterie, qu'en est-il de cet album ?
On avait senti une grande évolution en écoutant "Les enfants de Saturne", comme si Thomas Boulard n'était plus bridé par les autres membres du groupe (qu'il a gentiment dégagé les uns après les autres), et il confirme avec ce nouvel album qu'il est un excellent compositeur rock. Alors, OK, au niveau des paroles, ça pourrait être mieux (non parce que, bon, si il pouvait trouver d'autres mots dans le dictionnaire que « ombre », ça serait ptet pas plus mal, hein !), et je trouve que l'album est légèrement moins bon que le précédent, mais il y a du talent, de l'énergie, de la passion dans cet album. Luke est devenu à mon avis l'un des grands noms du rock français, avec qui il faudra compter à l'avenir.
Quitte à lui expliquer que le soleil et la lumière, ça existe aussi.