Death - Pierce Me
7.2
Death - Pierce Me

Album de Silencer (2001)

Pourquoi "critiquer" un tel album quand objectivement un chant qui n'en est pas un s'esclaffe à tout rompre sur les plate-bandes de l'auditeur interloqué, provoquant le mépris, la moquerie ou le dégoût ? Parce que finalement que retenir de cet album à part ce all-star band à lui tout seul qu'est ce fameux chanteur, prétendument interné peu après l'enregistrement de cet album, pour ensuite produire son dérivé électronique entre 4 murs blancs repeints à la camisole projetée ?

En-dehors de ces vrombissements qui feront rire la plupart des quidams pour peu qu'ils n'aient pas la folie de s'y plonger corps et âme pour ne finalement plus rien entendre que leur propre désespoir, c'est surtout cette ambiance Black aux forts relents Doom qui imprègnent toute la galette. Et à force d'écoutes, c'est surtout la grande qualité des compositions que l'on retient, avec à la fois une intensité émotionnelle et une certaine réflexion sur les "pauses" aménagées pendant et entre les morceaux : accalmies, piano, guitare sèche.
Belle interprétation de ce que doit représenter le Black Metal en tout cas, par des gens certainement parfaitement sains d'esprit pour produire un truc aussi précis. En résumé, couplez les riffs acérés un brin keupons d'un Celtic Frost à la froide mélancolie d'un groupe de Funeral Doom qui aurait accéléré le tempo, secouez le tout, et jetez-le contre la paroi de votre boite crânienne. Ou bien headbanguez pendant 3 heures sur du Black Cobra, cela produira peu ou prou le même effet, sans éprouver les mêmes causes : l'air hagard final ne sera non pas provoqué par le brutal va-et-vient qui comblera sans mal votre misère sexuelle, mais par une lente rumination lancinante de votre névrose intérieure. La boule au ventre en plus. Un peu comme si vous éprouviez les menstruations pour la première fois, comme dirait le misogyne du fond.

Parce qu'au fond Silencer c'est ça : une tâche de sang dans un paysage de désolation, à l'image d'une scène Black Metal sclérosée par toutes ces starlettes qui plus ou moins consciemment veulent devenir des rockstars (Satyricon, Taake, Shining) - ce qui ne les empêche pas pour autant de produire de la bonne musique - alors que Silencer semble placer la "sincérité" au-dessus de tout.
En toute objectivité, quel groupe oserait sortir un disque avec un tel niveau de professionnalisme dans l'arrangement, dans la production, avec un chant aussi "borderline" que ça ? Trop typé pour ne pas être risible, pas assez "frontal" et monocorde pour vraiment percuter le fan du BM "cahier des charges". Finalement, malgré les efforts consentis, c'est un échec commercial assuré. Pire, au cours de toutes ces années passées à parcourir les magazines spécialisés, je n'ai jamais trouvé une seule fois le nom de ce groupe ; un peu comme d'autres geeks incompris encensent Murmuüre, de l'autre bord, que je n'ai d'ailleurs jamais compris, alors que les journaleux se touchent sempiternellement sur les mêmes groupes dont il faut assurer la promo (Rock Hard au diapason).

Fou. Fou qu'un tel groupe, tout comme Bethlehem, dont le chant peut sensiblement être rapproché, n'ait jamais eu l'écho "médiatique" qu'il méritait au-delà de l'internet français. Certain qu'il a déjà pu faire vibrer les colonnes de canards comme Terrorizer, mais les Hard'n'Heavy, Hard Rock mag, Rock Hard et consorts n'ont à ma connaissance jamais fait cas de cette vague de groupes "dépressifs" vagues, sortis de nulle part, assez mal définis et marketés.

Enfin... Je pense depuis un bon moment déjà que résumer un CD avec des mots c'est comme pisser dans un violon ou travailler pour le plaisir : une illusion vaine. Plaquez votre expérience sur ce que vous écouterez, ce sera déjà bien suffisant. Ne me remerciez pas pour vous avoir fait perdre votre temps, c'est mon plaisir.
En tout cas moi j'y ai trouvé un refuge miroir dans lequel j'ai pu me mirer à l'envi pendant longtemps. Un slip odorant qui colle à la peau, et qui finalement aurait très bien pu avoir le fameux statut d'ultime "Shape of Despair". Allez-y, tentez, vous ne perdrez que peu de temps et aurez le sentiment de gagner en maturité, si vous prenez le temps, au lieu de le donner à vos maitres. Une leçon d'individualisme forcené dans un monde d'individualisme post-social : la face cachée d'une copie carbone à la structure cadrée mais à la calligraphie dégueulasse. Allez, soyez un peu égoïstes, nom de dieu !

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le 8 avr. 2014

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Adrast

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