Après trois albums, Kiss avait trouvé son style : riffs trempés hard rock, hymnes taillés pour les concerts, extravagance à souhait et allégresse contagieuse, le tout avec des paroles égrillardes.
Destroyer arrive donc en pleine maturité du groupe, et ça se ressent à travers les compositions. Les quatre maquillés savent où ils vont et quoi produire, et ce n’est pas pour rien que cet opus est considéré comme un de leurs meilleurs albums.
Detroit Rock City, devenu un trois énormes succès de Kiss, nous immerge immédiatement dans l'univers énergique et accrocheur de la bande à Gene et Paul. Les riffs puissants et entraînants font immédiatement effet, et l’énergie communicative gagne en intensité quand déboule la voix de Paul Stanley jusqu’à atteindre son apogée avec le solo délicieusement mélodieux d’Ace Frehley, qui se paye le luxe d’être harmonisé. Avec un tel morceau, l’auditeur est prévenu !
King of the Night Time World et Shout it Out Loud se distinguent par leurs refrains accrocheurs, bien que le second soir bien plus travaillé pour être joué en concert que le premier, ce qui lui donne un côté plus jovial.
Great Expectations et Beth sont les pistes plus douces de l’album, la seconde étant même exclusivement jouée piano. La première correspond au caractère plus rugueux de Gene, qui la chante, et la seconde à la tendresse de Peter Criss, qui envoie chier sa femme avec poésie pour pouvoir répéter avec ses collègues. Celles-ci apportent des moments d’apaisement mais ne sont pas transcendantes. De l’eau tiède.
Flaming Youth, Do You Love Me et Rock And Roll Party font figure de pistes de remplissage, mais leurs teintes groovy et festives l’essence de Kiss, les rend sympathiques à écouter.
Sweet Pain est le morceau estampillé Ace Frehley. Riff marqué blues, solo bien trempé, voix rauque et légèrement nasillarde. Il est plus calme qu’un Shock Me, mais on sent la patte de l’homme spatial. Ça marche avec moi.
Le chef d’œuvre de l’album est le gigantesque God of Thunder, immortalisé par la voix caverneuse et virile de Gene Simmons, offrant un parfait alliage avec sa basse du même acabit. Le tempo est modéré, on voyage entre ciel et enfer, avec ce dieu du tonnerre aux magnétisme et charisme infernaux. Le refrain est monumental, quel plaisir de le scander en même temps que le démon. Pas étonnant qu’une telle perle noire soit jouée en concert devant une foule impatiente depuis presque quarante ans. C’est un morceau que je vénère.
L'album est également marqué par des arrangements sophistiqués et une production soignée qui met en valeur chaque instrument et chaque voix. Le travail du producteur Bob Ezrin a ajouté une dimension supplémentaire à la musique de Kiss, en créant des textures sonores riches et en incorporant des éléments orchestraux.
Destroyer est un révélateur du talent de composition et de production artistique de Kiss. Les paroles, bien que parfois niaises et balourdes, font partie de l’essence théâtrale des peinturlurés, contribuant à l'esthétique unique du groupe et renforçant leur image de musiciens extravagants.