Les frérots ont construit leur carrière sur un braquage. Ils sont passés de la case départ à la Rue de la paix, de la zonzon aux beaux quartiers, sans payer la taxe. Ils s'inscrivent dans une tradition de combativité propre au rap français avec ses incursions hardcore, puisque les frangins ont toujours affiché leur succès à titre d'exemple à suivre pour la génération des cités déshéritées. Braquage, oui. Parce qu'ils ne savent pas rapper en mesure (bien qu'ils se soient améliorés), sans aucune plus value instrumentale (bien qu'Au DD nuancera cette assertion) et qu'ils déforment la syntaxe probablement par analphabétisme. Ademo et Nos sont deux braquos du succès et s'ils le doivent à eux mêmes (et un peu au socle communautaire qui les propulsa quand même), ils anéantissent en revanche la fiction méritocratique qui viendrait légitimer l'équation talent = succès. C'est d'ailleurs bien ce qui dérange principalement leurs détracteurs : pourquoi ces types et pas d'autres (TripleGo par exemple)? Qu'ont-ils fait pour mériter la reconnaissance ? C'est bien là où je veux en venir : ils n'ont aucun mérite parce qu'ils n'ont aucun talent. Aucun talent parce qu'aucun mérite n'existe. Leur performance sur la Tour Eiffel signe leur consécration triomphale, promotion ostentatoire régie par le hasard et le flou total. Ils le disent "l'ascenseur est bloqué", et l'ascenseur est bloqué parce que le Mérite est un culte surfait, construit et dépassé qui abandonne ses fidèles à la stagnation sociale. C'est d'ailleurs ce qui contrairement aux détracteurs plaît, plus ou moins inconsciemment, à leur public. Se dire que moi aussi je peux monter les marches du succès grâce au pas trop, à l'assez peu, au juste minimum. Ni peu, ni beaucoup. Juste le "moyen" terme érigé en valeur étalon de l'homme. Pas de méritocratie chez PNL, mais une médiocratie, parce que le talent n'a jamais fait grimper personne, pas comme ça, pas par sa seule impulsion. Ce sont, en sus, d'admirables businessmen. En cela ils privilégient le réseau. Ils ont fidélisé le iencli, pris dans leur toile la France en otage, transformant le public en un gigantesque réseau tentaculaire de fanboys.