Chronique et analyse à retrouver sur Culture : https://journalculture.wixsite.com/culture/single-post/2017/10/25/DBSS-III-dernier-%25C3%25A9pisode-dune-jolie-s%25C3%25A9rie


Il l'avait annoncé sur Twitter il y a quelques mois : jamais 2 sans 3. Et ce fut le cas.
Vendredi 06 octobre le rappeur de 1995 dévoilât le dernier volet d’une trilogie où les 2 premiers volets furent bien accueillis et où Sneazzy renaissait de ses cendres après l’échec de son album Super.
Que vaut ce DBSS III, qui témoigne aussi d’une très belle productivité de l’artiste parisien.


Regardons d’abord le projet de haut et sur la forme.
Pochette très basique, à l’image de celle du volet précèdent, qui fait plus photo Instagram que pochette d’album, EP ou autre...soit, ce n’est pas ceci qui importe au final même si on peut tout de même reprocher à Sneazzy la simplicité de ses covers.


Ensuite, la tracklist. Si la pochette peut donner envie de s’intéresser à un projet, la tracklist encore plus.
Et si sur le premier point on a le droit d’être déçu et de froncer les sourcils, sur le second nous ne pouvons pas...si ce n’est par surprise et satisfaction.
Invités par Sneazzy, Alpha Wann, Doum’s, Laylow, Jok’air (entre autres) sont de la partie et se prêtent à l’exercice de l’égo-trip maîtrisé par leur hôte.
Un beau monde qui rend le projet tout de suite plus intriguant et intéressant surtout quand certains des artistes cités collaborent sur un même track...


Si la pochette révélée 3 jours avant la sortie de DBSS III était très (trop) simpliste, la tracklist fait effet contraire et donne envie de se pencher sur le projet d’un œil plus attentif.



Une production minutieuse



Au final nous pourrions résumer le projet en une ligne : concentré de punchlines desservi sur le travail de Hugz Hefner.
Très réducteur mais pas forcément faux.


Mais regardons tout de même le projet sous plusieurs angles.
Tout d’abord le travail de production de Hugz Hefner, un travail qui vaut le coup d’être regardé de près, de très près.
Ce qu’il faut savoir c’est que le « Hugz t’es en feu sur celle-là » n’est pas présent sur chaque morceau du projet mais son détenteur l’est.
Le producteur a produit les 8 titres (et en coproduction sur Everyday et Je m'enfuis avec respectivement L$30 et Biggie Jo) de DBSS III, et ça se sent.


Une réelle couleur au niveau de la production se ressent, c’est très cohérent et très bien exécuté.
Un mélange de trap futuriste et de cloud rap, c’est que **Hugz arrive à allier pour ces 8 titres.**
Mélodies, basses, pianos, synthés : tout y est et c’est remarquablement bien fait
Chaque instrumentale est d’une minutie folle, on sent que tout est bien senti, tout est travaillé pour ne rien laisser de côté.


Mais finalement, Sneazzy et Hugz Hefner forment un duo terriblement redoutable et efficace où le producteur sait exactement ce que son artiste cherche.
Une vraie alchimie s’est forgée au cours de la trilogie de DBSS et le dernier opus en témoigne.


En outre de cette complicité, une diversité est présente et on sent un producteur à l’aise dans plusieurs style, de la trap aux instrumentales plus génériques ou plus douces et dansantes.
On retrouvait ceci sur DBSS II, qui était aussi le fruit d’un mélange de plusieurs sonorités et c’était assez agréable parce que ça peut éviter à Sneazzy de trop s’enfermer dans un style, dans un zone de confort et de proposer quelque chose de simple.


Hugz Hegfner arrive à se renouveler sur chaque projet de Sneazzy, à proposer une musique trap toujours plus élégante et moins clichée que ce que le style propose de plus basique.
Percutant, entraînant, envoûtant, élégant : quelques mots pour décrire le travail de Hugz Hefner sur cet opus des DBSS.



Un égo-trip renouvelé



Un travail remarquable que l’artiste vedette se devait d’honorer et de proposer quelque chose du même niveau pour ne pas être en dessous du niveau de l’instrumentale.
Chose réussie ou non, Sneazzy arrive à dompter chaque instrumentale pour débiter toutes ces punchlines de manière intéressante.


Et si les productions sont perfectionnées, les lyrics de Sneazzy sont d’une extrême minutie.
Tout est parfaitement calé, tout est bien pensé et le travail est très bien fait.
Sur la forme, il faut être un adepte de l’égo-trip, de la vantardise incessante de l’artiste et friand de références et punchlines car sur 8 morceaux (dont un solo de Hankock, Dark Angel), au moins 6 sont dans ce style.


C’est une grosse part du projet mais ce depuis que la série des DBSS a débuté : Sneazzy a toujours prôné un égo-trip incessant.
Et finalement, si le projet ne tourne pas en rond c’est aussi grâce au travail de Hugz Hefner qui oblige le rappeur membre de 1995 à se diversifier, à s’adapter à l’instrumentale.


Et ceci aussi est intéressant : Sneazzy adopte plusieurs flows et arrive à jongler entre ces derniers en fonction de l’instrumentale choisie.
Au final, on retrouve un artiste polyvalent dans sa technique avec des instrumentales plutôt orientées trap (mais trap moderne) ou alors plus dansantes, légères, à l’image de Évite la présent sur le second opus de la « série ».


Et face à cette diversité de production, les morceaux du projet peuvent être très différent à l’image de 30040, dernier morceau de DBSS III, qui est rapide, entraînant, où l’instrumentale offre à Sneazzy toute la liberté qu’il veut pour débiter toutes ses punchlines.
Tout le contraire de Je m’enfuis avec Still Fresh, artiste plutôt pop/rap, qui va être un morceau plus léger, plus doux avec des sonorités très différentes du morceau cité précédemment mais aussi avec un thème opposé : l’amour.
Ce dernier est abordé de manière très entraînante, avec des couplets chantonnés et un refrain assez proche de ce que Drake peut proposer avec un Controlla ou One Dance.
Une diversité artistique qui peut aussi montrer que Sneazzy arrive à faire autre chose qu’un simple égo-trip car le rappeur arrive à renouveler et à se renouveler dans ce style.


Et l’énorme faculté du rappeur parisien est de distiller un nombre énorme de punchlines sur un seul morceau.
Une faculté sublimée par une autre : Sneazzy a le talent de faire des phases très imagées, des références très subtiles et très bien pensées, des punchlines à comprendre en 2 fois.


Et c’est finalement cette seconde faculté qui permet à la première de rendre les projets de Sneazzy intéressant dans le fond et de les rendre très bon au final.
Car oui, si la forme peut laisser à désirer pour certains, le fond est bon, très bon.


Pourquoi ? DBSS III n’est qu’un concentré de punchlines et de vantardise ? Peut-être.
Mais il faut voir plus loin que cela : Sneazzy n’a peut-être pas le talent d’écriture de son compère Nekfeu qui joue avec les mots, rend ses textes assez poétiques, Sneazzy n’a pas ceci mais il a la technique et la recette pour faire des phases qui font froncer les sourcils et provoquer une réaction de surprise ou d’admiration.


Presque tous les morceaux sont marqués par une punchline, une référence et c’est ça la force de Sneazzy : faire quelque chose de facile d’apparence mais très subtilement.
Le rappeur se donne alors une apparence d’homme d’affaires, accompagné d’une équipe réunissant les meilleurs, riche et intouchable, qui a un monopole sur tout et n’importe qui avec un charme fou sur les femmes.
Un peu gros doigt mais tellement bien réalisé et très subtilement.



J’arrive à Montparnasse à bord d’un gros gamos
Tu me rejoins mais t’es venu par la 13
Sont battus comme la terre de Roland-Garros »
[...]
Dans ma ville, on me déroule red carpet
A la banque, on m’réserve accueil triomphal.
- Parle pas trop



Vantardise, richesse et mépris de la concurrence : tout y est.
30040 pourrait être un résumé de ce résumé du projet avec des phases qui seront surement mythiques dans le futur (et qui rentreront dans le panthéon des punchlines de Sneazzy.)



Ma mère c’est mon père mais c’est pas Caitlyn /
Ma mère c’est mon père mais c’est pas Bruce Jenner
[...]
J’ai enlevé le toit rebeu, j’suis à l’air libre
Vitre baissée dans Paris, dans une Berline [...]
J’me fait lé-bran sur un canapé rouge mais c’est pas dans Vivement Dimanche.



Simple d’apparence mais tellement subtil et bien pensé.


De plus, Sneazzy a aussi l’atout d’utiliser des ad-libs assez souvent après chaque phase, pratique très utilisée dans le rap américain, surtout par Migos, ce qui apporte un dynamisme supplémentaire aux couplets et aux morceaux en général.
Les ad-libs sont assez basiques mais font le travail et sont bien gérés.
Finalement, en terme d’écriture il ne faut pas attendre de Sneazzy quelque chose d’exceptionnel, ou de très riche mais le rappeur offre quelque chose d’honorable, un égo-trip qu’il maîtrise à la perfection, qu’il arrive à renouveler avec une jolie technique et des superbes instrumentales de Hugz Hefner.



On peut s'payer des tueurs à gages
Pour tous vous faire disparaître pour quelques bitcoins
Hugz, j'ai même pas ouvert ma boîte mail mais j'entends d'jà que le beat cogne
- Parle pas trop




Un beau final ?



Dernier volet de cette trilogie, ce dernier volet témoigne aussi au final d’une belle évolution artistique de Sneazzy


On retrouve un rappeur plus en forme que jamais dans ce troisième épisode de la série DBSS et surtout avec quelque chose de bien plus maîtrisé que dans le premier.
Une auto-tune bien mieux gérée par exemple, des flows variés et une écriture plus mure dans le style approché.
Punchlines plus subtils, moins gros doigt ou cliché malgré le thème qui reste le même que dans les deux DBSS précédents.


Puis au niveau de la production aussi on retrouve quelque chose de vraiment maîtrisé de A à Z, on a un projet cohérent malgré certains morceaux qui diffèrent des autres dans leur style.
Enfin, peut-être que ce projet arrivait à point et confirme Sneazzy comme maître dans le style qu’il affectionne.


On peut en revanche attendre quelque chose de plus concret par la suite, de plus personnel dans les thèmes ainsi qu’une autre approche musicale que l’égo-trip malgré des morceaux plus légers dans les 2 derniers DBSS, pousser ce délire plus loin et délaisser encore un peu plus l’égo-trip sur quelque morceaux pour peut-être aborder des choses plus personnel à l’artiste.


En attendant, DBSS III conclut une belle trilogie qui a su ramener Sneazzy sur le devant la scène (notamment avec une belle tournée avec S.Pri Noir) et l’imposer comme un artiste sérieux dans le paysage du rap de l’hexagone.


Toujours sérieux dans ses bails.

SMsquad
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le 29 oct. 2017

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