4 ans après ses Histoires extraordinaires, Disiz revient avec un cinquième et dernier album : Disiz the End où le rappeur annonce vouloir quitter le milieu du rap. Cet album sort en 2009 et Disiz sortira son prochain maxi de rap en 2012 (le très bon Lucide). Il faut donc dire qu'avec le recul, cet album démarre mal. Il a, en effet, la prétention d'annoncer un départ définitif alors qu'on aura une pause moins grande que celle entre les deux albums précédents.
On a donc l'impression que ce départ plein de haine envers le milieu du rap n'est pas mérité et est illusoire. Disiz the End souffre de ce constat, souffre de l'éloignement temporel qui fait de cet album un testament musical sans valeur puisque la résurrection a eu lieu. On ne peut que être gêné à l'écoute en sachant que non, Disiz ne s'est pas arrêté.
J'aime bien Disiz, mais il en ressort que cet album manque soit de sincérité soit de réflexion, étant donné qu'à peine 3 ans plus tard, Disiz sera déjà de retour.
L'album s'offre pas mal de titres sur le fait de quitter le rap. Un regard sur le passé ainsi que la carrière de rappeur et la difficulté des débuts via l'appréciable Alors tu veux rapper.
A côté de ça, Disiz fait un peu d'égo-trip, se considérant comme meilleur que les autres, mais si unique et si spécial qu'il est mal à l'aise dans ce milieu et préfère le quitter. Très difficile à apprécier avec du recul. La Fin du Début, première piste de l'album annonce tout de suite la couleur à ce sujet, c'est un titre plutôt agréable là encore et bien réussi.
Bête de Bombe aura le mérite de bien flinguer le côté « lover » et autotune des rappeurs, et sera également très appréciable.
L'album démarre bien, malgré quelques légères faiblesses de flow par moment, on se dit que le moment est agréable, qu'on écoute de la bonne musique même si on regrette de savoir que cette promesse de départ définitif ne sera pas tenue.
Il est déjà trop tard évoque aussi ce départ du rap, c'est pas incroyable, ça parle beaucoup de soi. Le titre repose beaucoup sur l'instru tant ce qui y est dit donne un sentiment de répétition au vu des morceaux précédents.
Autre moment fort sur la thématique de quitter le rap : 27 Octobre. Un titre particulièrement réussi, simple dans sa composition mais efficace. Disiz y évoque la jalousie envers les rappeurs et les difficultés qui en ressortent, le sentiment de n'avoir plus personne autour de soi et la difficulté de continuer à construire sa vie. Très fort, le titre est réussi et nous permet de mieux saisir cette volonté de départ. Il s'agit surement d'un des 10 meilleurs morceaux du rappeur.
On est cependant vite calmé par C'est la Vérité où l'instru et le flow se font concurrence pour savoir lequel est le plus raté. Disiz se la joue donneur de leçon, lui le chevalier blanc au grand cœur.
Cette thématique d'être propre sur soi va se retrouver tout le long de l'album aussi. Particulièrement avec Le Temps Précieux où Disiz, en plus de jouer l'anti-ghetto (ce qui est plutôt une qualité à mon sens) souligne également sa « pureté » : pas d'alcool, pas de drogue, pas de vol, pas de violence. A tel point que ça semble exagéré et qu'une partie de son public pourrait mal le prendre.
Est-on mauvais parce qu'on aime boire une bière ?
J'ai Changé parle de la mère de Disiz. Un sujet qui lui tient à cœur, cherchant à montrer qu'il fut un fils gentil, par amour pour sa mère. Mouai, c'est pas mal, mais disons que le côté « moralisateur et bisounours » peut rapidement devenir longuet et répétitif.
Disiz joue également la carte de l'amour, à la limite de l'exagération avec L.O.V.E, morceau romantique un poil trop long et lent où est mis en avant les romances d'écoles primaires et de collège. Ca manque de sérieux tout ça et donc on peut sourire de la naïveté des faits, énoncés avec autant de sérieux par Disiz.
Papa Lova, pour sa part évoque l'amour que peut recevoir un père dans la galère, grâce à ses enfants. Le titre n'évoque pas tant l'amour que l'on donne à ses enfants que celui qu'il nous donne. Titre sympa, simple mais sincère.
Une partie plus politique est également présente dans l'album, mais peut être trop discrète. On notera le très révolutionnaire (et réussi) Quand le Peuple va se lever. Un des meilleurs moments de l'album, clairement.
Odyssée avec une instru un peu plus métal dans la guitare/basse parle beaucoup du rapport de l'Occident à l'Afrique et de la manière qu'à Disiz à concevoir cela. Pas de facilité dans ses propos. Un racisme qui est critiqué avec intelligence, là encore intéressant.
Le Monde sur Mesure est un morceau sans réel profondeur pour sa part, qui aurait pu être largement dispensable.
Disiz the End qui termine l'album échoue à dire adieu tant on sait que c'est un simple aurevoir.
Au final, Disiz aura échoué avec ce cinquième album. Pas tant parce qu'il est mauvais, mais parce que le message d'adieu sonne faux désormais. Quand bien même on ne voudrait que la pertinence des rimes et la qualité du flow, on est condamné à refuser une partie du fond. Et c'est assez triste.
Le flow de Disiz est un peu fatigué sur cet album est n'est pas vraiment au niveau de ce qu'il avait réalisé par le passé. La forte présence d'égo-trip, justifiée par le départ de Disiz, perd également son sens avec cette simple pause.
La surprésence de la douceur, d'une douceur vindicative (avoir des enfants, ne pas boire, ne pas fumer, ne pas se droguer, être gentil avec sa maman, voilà le message de Disiz) pourra agacer quand on compare à la faible présence de revendications politiques, pourtant bien écrites (4 titres contre 2).
Cet album se veut donc intimiste et est plutôt réussi à ce sujet là. Le problème est qu'on est pas sur de vouloir l'intimité de Disiz, lui-même disant qu'il préfère rapper ce qui le fait vibrer plutôt que de ce qu'il vit. De plus, encore une fois, une partie de l'intimiste ne se justifie plus quand on connaît le retour du rappeur.
Disiz the End est donc une étape étrange et difficile à juger dans sa carrière.