États d'âmes
7.1
États d'âmes

Album de Kabal (1998)

Etat d'âmes est souvent décrit comme un album difficile d'accès, sombre, inextricable. Mais venant de Kabal, comment pourrait-il en être autrement ? Amateur de rimes faciles et de textes insipides, passez votre route ! L'intro, avec le sample de Vol au dessus d'un nid de coucou plante le décor : l'album sera sombre. Etats D'âmes est une plongée aux portes de la folie du monde malade de cette fin de millénaire.


La plume est ciselée, le verbe acéré. D' et Djamal maîtrisent l'art d'écrire : qu'ils nous racontent une histoire ou qu'ils nous invitent à la réflexion, le style est toujours juste, les mots sincères et extrêmement bien choisis. Les textes sont une invitation à prendre de la hauteur et à éveiller sa conscience. A sortir de sa bulle, de sa rue, de son pays, de son quartier pour comprendre le monde et ses enjeux. A se cultiver, se remettre en question et réfléchir, encore et toujours. Un air de XVIIIème siècle souffle sur cet album. Rap conscient ? Je ne sais pas. Mais rap des Lumières sans aucun doute.


Côté instru... Là encore Kabal tape très fort. Proche d'Assassin le Krü est dans les premiers à mixer rap et rock. Et si c'est surtout prégnant sur scène, notons tout de même la présence de "vrais musiciens" sur l'album. Nous avons donc DJ Toty aux platines – avec des scratchs qui tuent ! –, Professor K à la basse, Franck Vaillant à la batterie et Skalp à la guitare. Il en sort une atmosphère musicale lourde et puissante aux basses lancinantes. Une mise en musique qui met parfaitement en valeur la voix criarde de Djamal et celle déjà basse et gutturale de D'.


Cet album est une perle noir, un éclat de lumière dans l'histoire du rap français, incontournable et indispensable dans la discothèque de tout rapophile. Kabal n'est malheureusement pas reconnu à la hauteur de son talent. Le groupe aura pourtant laissé une emprunte non négligeable dans le rap français, par ses textes, ses instrus, son audace. Rien à jeter dans cet album, à part peut-être le très dispensable Là-bas et ses cœurs, qui vient juste mettre en lumière le talent déployé sur tous les autres titres. Ceci étant un avis purement subjectif. Les pépites sont nombreuses, mais à noter tout de même Hostile, Le Dormeur du Val, Apache, L.U.I, Au bord du ruisseau, Fou à nier II, Le cercle des poètes enragés, et Frontières.


Nous nous quitterons sur ces quelques mots extraits de Frontières :



C'est la quête de l'invisible Matérialiser les actes de l'esprit, sans
perdre le fil Dans l'interdiction d'outrepasser la ligne Seuls y
parviennent les plus agiles, les plus dignes Imagine que les mots
glissent Tant qu'ils ne font pas de hors-­piste Respect de l'intime, fine intention L'abstention au profit des sensations L'arc-­en-­ciel s'apprécie sans le concours des sons


Lorelei_sc
9
Écrit par

Cet utilisateur l'a également mis dans ses coups de cœur.

Créée

le 25 nov. 2017

Critique lue 422 fois

Lorelei_sc

Écrit par

Critique lue 422 fois

Du même critique

L'Homme qui n'aimait plus les chats
Lorelei_sc
10

« ... une graine qu'on ne voit pas encore germer... »

Trouver les mots à poser à côté de ceux d'Isabelle, ceux qui sauront parler de cette histoire si joliment offerte ne va pas être facile. Néanmoins, je vais essayer ! L'essence d'un livre, ce n'est...

le 18 déc. 2019

4 j'aime

2

Places Where We Go in Dreams (EP)
Lorelei_sc
8

Rêves glacés

C'est un dimanche caniculaire. Un dimanche dans le noir d'une maison en pierre à la recherche d'un peu de fraîcheur. Un dimanche suffocant. L'image fait son apparition entre deux pages d'un bouquin,...

le 20 juil. 2018

4 j'aime