Très beau récital, très virtuose, de Boris Berezovsky, pianiste parmi les plus impressionnants de sa génération avec son style de jeu cristallin et puissant. Il faut aller écouter son intégrale des Études de Chopin, parue chez Teldec en 1991 et malheureusement absente de la base de donnée du site (le disque semble lui aussi introuvable) : elle compte selon moi parmi les toutes meilleures interprétations, aux côtés de Murray Perahia, un peu trop sage, et d’Ashkenazy, que beaucoup citent en référence même s’il est trop gentil sur les pièces fortes. Il me manque encore à écouter les versions de Lugansky et de Cziffra.
La gentillesse est une qualité heureusement très pondérée chez Berezovsky, ce qui donne une amplitude dans certaines compositions qui n’a d’égal que la clarté des notes, l’absence de toute saccade, cela pourtant en conservant une musicalité qui s’exprime très distinctement tout du long, comme une cascade majestueuse.
Je ne connaissais pas les relectures que Godowsky avait fait des 24 cahiers, mais que dire si ce n’est qu’elles sont pour certaines d’une difficulté d’exécution démentielle, et qui ne semble pourtant pas atteindre l’ours russe ? Au début du moins les pièces choisies sont d’un niveau spectaculaire. Vers le milieu, on pourrait dire qu’elles se transforment en une oasis (à la douceur toute relative) pour reposer les doigts de Berezovsky entre deux morceaux de Chopin, toujours redoutables.
Jusqu’au bout cependant le pianiste garde sa fougue et sa lisibilité sur le clavier, son air goguenard et délicieusement espiègle, derrière sa carrure d’homme des cavernes. Il est d’ailleurs bon à savoir que Berezovsky joue souvent en « encore » l’étude op. 10 no. 1… Un peu comme Pogorelich qui revenait pour torcher l’Islamey en deux-deux après une heure et demie de concert...