Réalisé par Wim Wenders, Every Thing Will Be Fine compte James Franco dans le rôle d'un homme responsable d'un accident de voiture. Le film s'intéresse à sa culpabilité et sa recherche de rédemption qui durera des années. Il a été projeté au Festival de Berlin en février dernier et est sorti un peu partout dans le Monde sauf aux Etats-Unis où il est prévu pour la fin d'année, période des Oscars. Si l'on en croit les critiques, il semblerait toutefois que la célèbre cérémonie d'Hollywood soit hors de portée du film.
Après une incroyable (et prolifique) année 2014, cela faisait quelques temps qu'aucun album d'Alexandre Desplat n'avait montré le bout de son nez. Il ne s'agissait pas d'une prise de repos du compositeur, mais simplement d'un concours de circonstances: les partitions qu'il a composé en 2015 le sont pour des films qui sortent en fin d'année.
Il a enregistré le score seulement une semaine avant la *Première* de Berlin, et j'étais assez impatient d'entendre ce que le compositeur écrirait pour ce film, ayant en mémoire la formidable partition qu'il a composé pour un autre film contemplatif: The Tree of Life.
Le résultat est une partition très mélodique, très calme, composée pour un orchestre pour cordes et piano. Le titre d'ouverture est à ce propos saisissant: un motif au piano de 5 notes très efficace qui semble flotter dans l'air; ensuite un thème tragique pour cordes, très proche de mélodies à la John Barry, Desplat réussissant à faire écho au talent de Barry de composer des musiques incroyablement tristes mais également incroyablement belles. Mais quand il développe ses mélodies, Desplat le fait de façon très personnelle. Les parties de cordes sont pour le moins superbes et parfaitement jouées.
Le second titre, "The House in the Snow", est encore plus triste que le premier et possède une structure très intéressante faite de "pauses" brèves. La volonté de ces "arrêts" est d'illustrer la prise de recul avant de repartir de l'avant. C'est fait de façon très subtile et intelligente.
Le motif répété en boucle de "The Accident", incessant, intense, montre combien un instant dramatique d'une vie peut nous hanter longtemps, est enfin déstructuré dans le tragique "Autumn".
J'aime beaucoup les variations faites du très beau thème principal, notamment dans "Tomas Writes" qui est élégiaque et angoissé. Il y a également un moment où le motif de 5 notes au piano du début de l'album est repris de façon plus poussé. Dans "On the Ferry" Desplat le développe de façon unique et le fait que le piano ne soit pas accompagné donne du souffle à la mélodie.
Le court titre "A Strange Phone Call" est un morceau typique du compositeur, une valse subtile qui porte un côté psychologique et dramatique à la fois. Moins habituel, ce "The Letters" avec son un tempo dans l'urgence joué principalement au piano, et répété tout du long tel le son d'un train en marche.
"Kate’s House at Night" reprend l'utilisation des "pauses" de "The House in the Snow", la grande différence cette fois étant la chaleur à mesure que le titre avance. La musique se fait de plus en plus joyeuse, (des instruments s'invitant à chaque reprise) et les "pauses" de plus en plus éloignées.
"Christopher’s Sorrow" est un très joli titre qui revient au thème principal mais utilisant une section de cordes de façon différente, celles-ci se répondant l'une l'autre. Le score se termine avec "Reconciliation", un magnifique titre qui reprend la plupart des thèmes de l'album dans une orchestration vraiment superbe.
Every Thing Will Be Fine est une partition riche, intrigante, et très intéressante. L'approche profonde de Desplat pour sa musique ne fait pas exception ici. La richesse émotionnelle qu'il donne à cette musique est ce qui la démarque. Cette histoire de parcours d'une tragédie vers la rédemption est parfaitement illustrée par la musique, emplie de nuances subtiles et vraiment (parfois très) tristes. Encore un très beau score de monsieur Desplat.