Avec “Everybody Knows This Is Nowhere” Neil Young va obtenir le succès et la consécration, ce sera son premier grand classique, un album qui fera date et s’inscrira dans la mémoire d’une génération. Ce succès c’est d’abord le fruit d’une rencontre. A la suite de son premier album, il prend goût à jouer en compagnie d’un groupe de bar New Yorkais rencontré au Whisky-A-Gogo : les Rockets. Il décide de les embaucher pour une tournée et les rebaptise le « Crazy Horse », c’est ainsi que Danny Whitten, Ralph Molina et Billy Talbot accompagnèrent neil dans les studios pour enregistrer ce qui restera l’un des grands albums de la décennie.
La magie qui naît de cette rencontre tient de l’alchimie la plus subtile, c’est le mariage réussi des contraires, la conception d’une architecture à l’équilibre instable où la fragilité de la voix de Neil, au bord de la fêlure, se confronte à la force et à la puissance d’un torrent d’électricité et de distorsion. Toute sa vie durant Neil balancera dans cette ambivalence, la campagne et la ville, l’acoustique et l’électrique, la paix et la fureur.
Trois titres fondateurs ici, des totems plantés à jamais dans l’histoire du rock, le titre d’ouverture « Cinnamon Girl » ou comment se sentir happé dans un tourbillon de cire qui ne s’achèvera qu’à la dernière note de la face B. « Down by the River » où le jeu des guitares vous embrase les neurones pour un aller simple, sans retour, et « Cowgirl in the Sand » dont Neil ne sait pas alors qu’il jouera ce titre lors de ses concerts quarante ans après l’avoir composé…
Trois titres écrits alors qu’il voguait entre deux eaux, dans un état comateux, fiévreux, malade. La musique lui battait le crâne et se forgeait un chemin dans son esprit torturé. Trois titres de feux où l’énergie se canalise et sculpte la matière sonore, creuse un sillon gravé en une journée au Studio de Topanga Canyon…
Mais “Everybody Knows This Is Nowhere” c’est aussi quatre autres morceaux dont la chanson-titre aux accents country, « Round & Round » ballade aux accents aériens et champêtres et « Running Dry » sous-titrée « Requiem for the Rockets » un Folk Song aux accents savoureux avec Bobby Notkoff au violon.
Un classique du rock.