Le gris de la stase
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Damon Albarn se présente en solo avec Everyday Robots.
nous accueille, une musique électronique aux reliefs de cordes et de samples, mélange judicieux et précis d’organique et de machine. « But everyday robots are getting old », chante l’anglais. Le robot qui vieillit souffre-t-il ? Et nous ? D’ailleurs, sommes-nous toujours humains ? Damon Albarn interroge les désillusions qui nous cernent, petits pions obnubilés de surconsommation que nous sommes, rouages d’une mécanique implacable qui nous dépasse et nous maintient en place. Esclaves de la machine.
Avec compassion et presque sans espoir, Damon Albarn nous alerte du danger.
De Hostiles à Hollow Ponds, il développe
prouvant s’il en était encore besoin, son exceptionnel talent de compositeur et d’arrangeur.
Au gré de mélodies hantées de pluies carillonnantes, de ballades pop aux chœurs puissants, parmi des sonorités neuves, et des arrangements minutieux, où parfois surgissent un air de Blur ou une ambiance Gorillaz, Damon Albarn raconte une histoire tantôt nostalgique, tantôt enchantée, autour de la solitude qu’engendrent nos sociétés de surconnexion.
Et soudain, une connexion m’assaille là, je pense à Blade Runner. Les thématiques de communication, d’humanité, d’adaptation à une époque désuète. La voix a quelques élans nostalgiques, et les morceaux sont parfois intimistes, mais l’artiste y distille avec maestria des notes cristallines, magicien de la complexité sans effet et des fioritures invisibles.
L’interlude Seven High fait le lien de ce que le musicien exprime en douceur dans l’album : une musique organique et mécanique,
la douceur naturelle du piano contre les accords industriels arrangés là, notre condition consumériste ancrée en nos chairs, animal inepte assoiffé d’inutile.
Une courte introduction a cappela, une annonce radiophonique, et Photographs (You Are Taking Now) démarre sur le battement régulier d’un cœur. La voix seule se développe alors en élans fluides, la machine endormie frissonne et se réchauffe de sensations qui portent le corps léger. Le cœur pulse, avec assurance, l’homme s’ouvre aux sentiments. « But beware of the photographs you are taking now ».
Damon Albarn nous quitte au rythme vivant de Heavy Seas Of Love, un refrain porté lourd par un chœur puissant dans lequel l’humain reprend de la voix pour s’affranchir de la machine. Il presse le bouton play de notre humanité, et de notre curiosité, pour que l’énergie dépensée ne soit pas vaine. Il nous invite à débrancher nos différents plugs pour retrouver la chaleur des contacts humains. La machine ne doit pas nous entraver mais nous servir : c’est ce que fait l’artiste, qui utilise ce que le progrès lui offre d’outils pour s’approcher au plus près de l’organique, de ce qui vibre si fort que le cœur et l’âme soient ainsi liés.
Inestimable.
Matthieu Marsan-Bacheré
Cet utilisateur l'a également ajouté à ses listes Les meilleurs albums de 2014 et Damon Albarn, Une Galaxie Musicale
Créée
le 5 mars 2015
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