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7.4
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Album de John Talabot (2012)

À Barcelone on est habitué à des températures caniculaires. C’est donc sans surprise que l’on sue à grosses gouttes sous les tropiques de John Talabot, natif de la capitale catalane : sa dance, délocalisée pour l’occasion sur l’équateur, est aussi dense, chaude et profonde que la forêt amazonienne. fIN offre à voir des arbres séculaires immenses, des plantes tortueuses ruisselantes, nous donne à entendre des chants de tribus oubliées, d’oiseaux aux couleurs éclatantes. C’est là le coup de force de John Talabot : il ne fait pas seulement danser, il crée aussi le cadre de la piste de danse. L’immersion est totale.

Contrairement à beaucoup de ses collègues, Talabot ne fait pas des rythmes sa priorité. D’ailleurs ceux-ci sont très simples et efficaces, d’aucuns diraient basiques. Sur fIN, ils ne sont là que pour nous inciter à remuer la tête, nous ancrer dans une réalité physique. Il faut d’ailleurs peu de temps au Barcelonais pour installer son beat et ses basses séduisants, et par conséquent ses compositions sont plutôt courtes. En cela il s’oppose donc au travail d’Axel Willner aka The Field, dont les morceaux s’étirent souvent sur de longues minutes. Mais l’effet est le même, on est en transe. Chez le suédois, l’effet est progressif, demande une concentration réelle qui se révèle payante sur la durée. Chez l’espagnol, on est ailleurs tout de suite. John Talabot a ce don d’installer une ambiance palpable et ce en quelques secondes seulement.

fIN commence ainsi par quelques piaillements, quelques cris qu’on imagine issus de la faune équatorienne (« Depake Ine »). Le dépaysement est alors immédiat, on s’imagine dans un climat moite, entouré de vert, partout. Dès lors, John Talabot ne cessera de nous faire ressentir cet environnement « 100% naturel » où un doux psychédélisme fait loi. Tout dans sa musique, des samples aux sons percussifs, rappellent en effet la faune et la flore de la jungle, ses habitants. Les voix s’apparentent le plus souvent à des chants tribaux (« Missing You »). Les claviers inquiétants évoquent souvent des instruments exotiques creusés dans le bois, à vent ou à percussion (idiophones). Le mysticisme n’est pas loin, tant les sons sont étranges, les chansons hypnotiques. Heureusement ce mysticisme n’est jamais embarrassant. Le but de Talabot n’est pas de déstabiliser, mais de plonger l’auditeur dans l’inconnu, un monde a priori hostile et pourtant incroyablement chaleureux. En ce sens les basses se veulent rassurantes, les mélodies évidentes, les sons caressants.

La musique électronique de John Talabot n’est donc pas seulement un bon prétexte pour danser. Le compositeur semble avoir plutôt écrit fIN comme la bande-son électro-world d’un documentaire sur une partie de la planète envahie par les plantes, dans laquelle vivraient encore quelques peuplades pacifiques aux rituels étranges. Le voyage est merveilleux et en écoutant ce premier album on ne souhaite qu’une chose : que fIN soit éternel.

Créée

le 2 janv. 2019

Modifiée

le 12 juin 2024

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François Lam

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