Thee Silver Mt. Zion poursuit sur son nouvel album le raffinage de ses ardents cantiques

En maintenant treize années d’existence, Thee Silver Mt. Zion prolonge l’assèchement des glandes lacrymales autrefois mises à l’épreuve sur ses deux premiers albums ivres de violons inquiétants et de sombres partitions. Une électrification catégorique, un bouleversement sonore s’est établi depuis longtemps déjà — Ce n’est pas pour rien que le groupe a nommé un de ses albums This Is Our Punk-Rock — et la hargne s’est férocement et définitivement introduite dans son langage au moment de la sortie du sauvage et brutal 13 Blues For Thirteen Moons en 2008.

Constamment en mouvement, Thee Silver Mt. Zion a connu diverses formations (jusqu’à dix musiciens, invités inclus). Sur Fuck Off Get Free We Pour Light On Everything le groupe resserre les rangs et se limite dorénavant à cinq membres. David Payant, nouveau batteur — déjà présent sur l’album précédent mais dont la contribution rythmique est ici indéniable — injecte une vélocité sans pareil. Le groupe n’a jamais été aussi cinglant que sur « Take Away These Early Grave Blues », cavalcade carabinée menée tambour battant. L’album est en outre un des mieux produits du groupe. Là ou d’autres souffrent d’asphyxie (plus particulièrement le très beau mais trop voilé Horses in the Sky paru en 2005), celui-ci jouit d’un son efficace et éclatant.



Les premiers morceaux « Fuck Off Get Free (For the Island of Montreal) » et « Austerity Blues », sont les fondations d’un album diablement mélodique : tous deux grondent pour finalement s’assagir à l’aide d’incantations vocales. C’est avec l’effréné « Take Away These Early Grave Blues » que l’on passe aux choses sérieuses. « Little Ones Run » est une belle ballade au piano chantée par Jessica Moss et Sophie Trudeau tandis que « What We Loved Was Not Enough » atteste une fois de plus de la haute qualité d’écriture du groupe. Un nombre restreint d’accords, des enluminures électrifiées, Thee Silver Mt. Zion n’est jamais très loin de l’énergie fondamentale du blues. Enfin, « Rains Thru the Roof at Thee Grande Ballroom (For Capital Steez) », hommage au rappeur américain qui s’est suicidé en sautant d’un immeuble fin 2012, désarçonne par son instrumentation synthétique pareille à une brume consolatrice.

À des années-lumière du post-rock, genre auquel Thee Silver Mt. Zion n’a au demeurant appartenu que dans l’affiliation de certains de ses membres (dont Efrim Menuck) à Godspeed You! Black Emperor, Fuck Off Get Free We Pour Light On Everything est le grand émancipateur d’un groupe qui n’a eu de cesse de raffiner et perfectionner son message.
julienldr
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le 3 févr. 2014

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