A 20ans plus tourné vers le Reggae, le Punk, l'AOR et la New wave il était tout de même difficile - j'avais des potes babos - de passer à côté de Marillion.
Dans les soirées du jeudi ou du vendredi voire du samedi, je bouillais d'envie de sortir et d'aller en soirée. Dehors...partout, et surtout bouger, s'agiter d'un bar à un autre pour des discussions de comptoir débiles, des clins d'oeil complices, des relations pateuses engluées dans la bière et le gin frelaté puis survolté divaguer vers une boîte enfumée ou les filles et les garçons ivres de vie et d'inconscience headbanguaient en cadence jusqu'à potron minet. S'agiter jusqu'au petit matin telle était la quête !
Ce n'était pas toujours possible, alors la soirée se passait dans les rires tranquilles, les sourires comme on sourit à 20 ans en plongeant dans les yeux d'une fille tout en écoutant Pete Gab, Dire Straits et Marillion. C'était bien, mais cette musique correspondait mal, au moins pour moi, au bouillonnement de la jeunesse, à l'electricité qui secoue un jeune gars, une jeune fille amoureux de la vie et qui ne le savent pas. Ensuite après un repas à l'équilibre douteux fait de conserves et de camembert une épaisse fumée apparaissait dans la pièce. Une odeur forte, épicée masquait tous les autres parfums. Un cone ou deux se mettaient à passer et ses volutes, douces blandices hypnotiques, enveloppaient toutes les choses d'une espèce de langueur. Les visages se déformaient, les sons se faisaient plus présents, les solos de guitares plus fiévreux, les rires plus stupides et la joie devenait palpable.
Je réécoute avec plaisir, subjugué par la voix de Fish les quatre premiers albums du Marillion et les fragrances remontent à la surface. Il se dégage des textes mais aussi des ambiances "néo-prog" et certainement de la voix typée, théâtralisée du chanteur au "bouffon" une poésie si mélancolique et narcotique que l'on pourrait presque, juste en fermant les yeux, sauter dans le passé pour retrouver le temps béni de l'ignorance.