La chaise du pendu, ce n'est pas ce qu'il y a de plus joyeux.
La chaise du pendu, on n'y emmènerait pas la belle Annabelle pour s'en aller plonger dans la profondeur de ses grands yeux bleus. La chaise du pendu, on n'y laisserait pas de petits enfants jouer avec leurs petites voitures colorées pour les faire slalomer et les faire tournoyer et les faire déraper entre les pieds de sa jolie assise. La chaise du pendu, on ne s'y installerait pas pour contempler les nuages défiler lentement dans la toile de ce magnifique ciel bleu, ou pour écouter tous ces petits oiseaux colorés réciter leurs plus beaux chants joyeux, ou encore même pour sentir le délicat parfum des fleurs qui s'épanouissent par une belle matinée de printemps s'infiltrer par l'entrebâillement de la fenêtre entrouverte.
Non, la chaise du pendu est plutôt macabre, plongée dans l'obscurité inquiétante d'une petite pièce sombre avec sa grande ombre qui s'étend à l'infinie comme la mort qui attend calmement son heure tranquillement tapie derrière elle. La chaise du pendu, qui, si l'on ne savait pas que c'était la chaise du pendu, et bien ne serait qu'une chaise comme toutes les autres, avec ses pieds et son assise et puis son dossier aussi et puis même pourquoi pas ses accoudoirs mais qui parce que c'est la chaise du pendu a quelques chose de lugubre, a quelque chose de funèbre, a quelque chose de tétanisant. Mais la chaise du pendu, ce n'est pas que ça, la chaise du pendu a aussi un côté profondément hypnotique, incroyablement mystique, définitivement obsédant, justement parce que c'est la chaise du pendu et que la mort s'est penché dessus.
Hangman's chair, comme son nom prophétique l'indique, c'est la musique de cette terrible chaise. Une musique pesante, depuis ces enfants et leur cantique innocente sur la corde qui laissent place à ces notes crades et bien grasses qui s'éternisent jusqu'à ce silence qui bourdonne dans nos oreilles. Une musique pesante comme le désespoir de tous ceux qui y sont grimper, avec ces longues et lentes introductions parlées et ses extraits de films sur quelques accords qui résonnent à l'infini, comme si les voies des morts venaient hanter les premières secondes de chaque morceau depuis le royaume de l'au-delà, pour ensuite laisser la place à des riffs de guitare lancinant qui viennent doucement vous lécher la nuque, et une basse plaintive qui vibre le long de chaque membre de votre corps et une voie tiraillée qui s'en vient se loger au milieu de vos tripes et une batterie puissante qui s'en vient souligner tout ça en tapant très forts pour résonner au plus profond de vos entrailles.
Hangman's chair, c'est la musique de la chaise du pendu, et elle a quelque chose de profondément touchante et d'infiniment beau, avec ses sentiments et ses sensations tourmentées, situé quelque part entre révolte et désespoir, entre souffrance et mélancolie, entre enfer et humanité.
Hangman's chair, c'est la musique de la chaise du pendu et l'on peut parfois se lasser, ou décrocher, ou bien même se perdre dans le labyrinthe oppressant de sa perpétuelle ambiance funèbre, mais qui peut vous conduire hors du temps avec ces effluves pesamment planantes vers un endroit inconnu et mystérieux, calme et bouillonnant, là-bas, quelque part entre la vie et la mort.