Hylas
6.9
Hylas

Album de Thomas Azier (2014)

Thomas Azier. Ce nom ne vous dit peut-être rien à l’heure actuelle, mais il y a de fortes chances qu’il soit sur toutes les lèvres dans quelques mois, et considéré comme la révélation electro pop de 2014. Après avoir sorti deux EP alléchants (respectivement intitulés "Hylas 001" et "Hylas 002"), Azier a en effet sauté le pas de l’album cette année, et comme il a l’air d’avoir de la suite dans les idées, il l’a nommé "Hylas" lui aussi. Le jeune berlinois d’adoption semble nourrir une obsession pour ce héros de la mythologie grecque, qui était apparemment un type extrêmement beau (comme tous les héros de la mythologie grecque), à tel point qu’il se fit enlever par des nymphes qui le prirent par la main et l’emmenèrent dans les profondeurs de la terre, d’où il ne revint jamais. Et là, on se dit que finalement, l’artiste a bien fait de rester focalisé sur cette histoire, puisque ce mélange de beauté et de noirceur sourde et lancinante, c’est exactement ce qui caractérise ce premier opus. Il se trouve que par hasard, il est un peu BG lui aussi, ce qui induit peut-être une forme de narcissisme, surtout quand on voit ce buste étincelant le représentant sur la pochette. Enfin bon.

Adoubée par Woodkid et Stromae, avec qui il a collaboré sur "Racine Carrée", la musique de Thomas Azier ressemble en effet à un mélange des univers du français et du belge, tout en parvenant à être moins chiante et pompeuse que celle du premier et plus eighties que celle du second. Pas pompeuse, certes, mais indéniablement lyrique et aérienne, et c’est l’un des aspects qui, au départ, m’a un tantinet rebuté. C’est un peu comme si le groupe Hurts - une autre influence ? - avait enfin réussi à pondre un disque correct, voyez (jetez une oreille à "Verwandlung", et que je sois pendu si ça ne ressemble pas à du Hurts… en mieux). Le style se veut à la fois grandiose, limite mystique, dans la voix et les arrangements, et très pop, très binaire dans les rythmes, avec des refrains qui croulent sous les "oooowooowooo" pleins de reverb. Le point fort de notre nouvelle coqueluche allemande, c’est qu’il est tout ce qu’il y a de plus qualifié pour composer des morceaux entêtants et puissants, qui vous donneront envie d’écouter l’album en boucle… Pour mieux apprivoiser les autres.
Pour simplifier, disons que selon mon humble avis, la première moitié de l’album est de grande qualité, et la seconde plus discutable, ou inégale, si vous préférez. L’intro donne immédiatement un aperçu de l’ambiance presque schizophrénique, avec ce côté mi-solaire, mi-electro, qui caractérisera l’ensemble des titres. "Ghostcity", ensuite, est aussi sombre et dansante que "Verwandlung" sera planante et tragique… Pas de doute, Azier cultive le contraste. Puis vient le tour de la tribale "Rukeli’s last dance", chanson la plus enjouée, hyper efficace malgré - ou grâce à ? - ses choeurs simplistes, annonciatrice de l’apogée de cet opus, à savoir le trio "Red eyes" / "Angelene" / "How to disappear". Ces trois morceaux ont beau avoir déjà vécu sur les EP précédents, l’artiste a bien fait de les réintégrer au tracklisting, surtout de cette façon. L’enchaînement est un enchantement, tour à tour énergique, vigoureux, sensuel, suave et émotionnel. Les quelques sonorités un peu kitsch sont aussitôt contrebalancées par d’autres, plus originales, et par un chant à la fois ample et désarmant de sincérité. A la fin de "How to disappear", on commence à être plus que convaincu par ce petit con au look boys band (car pour l’avoir vu en concert il y a peu, il faut avouer qu’il se la pète gentiment, quand même).

Et justement monsieur Azier, gare à ne pas prendre le melon, car votre album n’atteint pas la perfection de son modèle mythologique ! N’exagérons rien. Comme je le soulignais plus haut, à partir de "Futuresound", "Hylas" devient – hélas ! – plus bancal, moins inspiré et parfois presque trop racoleur. Bien qu’annonciatrice, sans doute, de vos futurs travaux, "Sirens of the citylight" n’est franchement pas une grande réussite, ni une conclusion digne de ce nom. "Shadow of the sun" et "Yearn yearn" souffrent aussi d’un léger manque de consistance, et c’est finalement "Golden wave", avec son flow langoureux et douloureux, qui emporte l’adhésion. De manière générale, rien de très grave, puisque ce disque laisse une impression plus que positive, reflet d’une electro pop très accessible et en même temps pleine de bonnes intentions. Le mythe Hylas servira-t-il de base au mythe Azier ? Il faut croire que ça part plutôt bien. A vous de juger.
Psychedeclic
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le 23 mars 2014

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