A 40 ans, il est n'est pas rare qu'on pète les plombs. Enfin c'est ce qu'on dit. Merrill Nisker aka Peaches, elle, n'a pas attendu cet âge (un peu) avancé pour sortir de ses gonds. D'albums que l'on pourrait qualifier d'electro punk minimale à des prestations scéniques pour le moins sulfureuses, elle a déjà tâté la folie de près. Avec ce nouvel album, la canadienne semble curieusement prendre le chemin inverse de nombreux de ses congénères.
Car à la base, l'obsession de Peaches, c'est le cul, de préférence sauvage et totalement décomplexé. Cela se ressentait dans ses paroles, ses tenues provocatrices et bien sûr sa musique, franchement directe, moite et sensuelle. Bien rock'n roll quoi. A l'écoute de I Feel Cream (au titre pourtant sans équivoque quand on connaît la dame), Nisker montre pourtant un autre visage, pas forcément apaisé, faut pas déconner non plus, mais moins crispé.
Il suffit d'écouter "Lose You" ou justement la chanson éponyme "I Feel Cream" pour s'en rendre compte: la voix se fait aérienne, presque enjôleuse, de vraies mélodies electro pop se dessinent, ce qui semblait hier impossible. Même au travers des titres les plus agressifs, aux basses chargées et lourdes comme du béton au mètre cube ("More", "Trick Or Treat"), une certaine douceur se fraye un chemin.
Pour autant, Peaches a su garder une verve vocale certaine, notamment sur les hymnes "Talk To Me", la doublette hip-hopesque "Billionaire"-"Mommy Complex" (on savait Nisker proche du courant rap, mais elle ne s'en était jamais autant approchée, le flow est impeccable), et bien sûr "Show Stopper", qui rappelle les aspirations rock passées.
C'est d'ailleurs symbolique: pas de guitare, pas de batterie, sur I Feel Cream, l'énergie rock (incarnée précédemment par les soutiens de Josh Homme et Iggy Pop, entre autres) a pour ainsi dire disparu, au profit de nouvelles collaborations, très prestigieuses, très nombreuses, mais dont on ne distingue pas la vraie utilité, pour être franc. Si ce n'est une caution " tout electro "...
Peut-être les inconditionnels de Simian Mobile Disco, Drums Of Death et autre Digitalism, sauront reconnaître leur patte, mais le fait est là: le son Peaches n'a pas évolué drastiquement, il s'est juste recentré sur l'élément synthétique.
C'est souvent réjouissant, mais à l'écoute de titres mous du genou comme "Mud", "Relax" et "Take You On", trio boiteux qui clôture le disque, on regrette un peu la violence et les aspérités des trois précédents brûlots.