Pour la puissance terrifiante, l’énergie, le lien avec le public, un must absolu !

Oui, on peut classer cet album live non seulement parmi les meilleurs albums en public des années 70 mais toutes périodes confondues. On y entend encore un groupe au sommet de sa puissance mais qui savait garder un lien très fort avec ses fans. Avec la mort de Bon Scott et les stades de plus en plus gigantesques à partir des années 90, ce lien-là a eu tendance à se disparaître. AC/DC venait de sortir « Powerage » et l’idée de leur maison de disques Atlantic était de faire paraître une compilation de leur 1ère période. Cette idée est abandonnée au profit d’un live puisque, après tout, c’est d’abord sur scène, au prix d’innombrables concerts incendiaires, que la réputation du groupe s’est construite. La mode était alors aux double voire triple live qui s’éternisaient dans des improvisations plus ou moins géniales, parfois pas du tout (Yes, Grateful Dead…). Pour le groupe, il n’en est absolument pas question : on branche les guitares et on envoie du jus avec des morceaux courts et les plus efficaces possibles, des petites bombes qui explosent à la face du public l’une après l’autre, la sueur coulant tout de suite sur le visage des musiciens et du public. En cela, on comprend pourquoi AC/DC est un des précurseurs du punk qui triomphait en 77/78 et les groupes punks avaient d’ailleurs un grand respect pour la formation des frangins Young. Ils y retrouvaient une radicalité et une immédiateté qu’ils appréciaient. Mais il y a une énorme différence, c’est d’abord qu’ici on a affaire à de VRAIS musiciens et qu’il n’est pas question pour eux de faire table rase du passé comme le souhaitaient les punks ; Angus adore trop Chuck Berry comme Muddy Waters pour les renier ! Et puis aussi, il y a une bonne humeur chez AC/DC qui est à mille lieues du « No Future » des Sex Pistols et de la conscience politique et sociale des Clash. Avec eux, on est là pour passer un bon moment, une bière à la main, s’éclater entre potes et rigoler aux histoires souvent grivoises de Bon Scott, rien d’autre !

C’est donc le concert de Glasgow du 30 avril 1978 qui est enregistré et l’Écosse est la terre d’origine des frères Young comme de Bon Scott, on est donc ici presque en famille et ça s’entend, le public écossais est chaud bouillant dès les 1ères notes et ne va jamais capituler, donnant au groupe l’envie d’envoyer toujours plus fort. Pendant les 52 mn que dure ce show, on sent la bière, la transpiration et le plaisir de jouer aussi (c’est tellement rare d’arriver à le capter sur un disque). Dès les 1ères mesures apocalyptiques de « Riff Raff », on sait qu’on tient du lourd, de l’historique, le ton est donné : « riff raff » signifie « racaille », un terme dont le groupe est très fier avec une vraie dose d’autodérision. Dans « Whole Lotta Rosie », Bon évoque sa vie, ses succès, ses déboires et excès avec une gouaille et un humour qui manquent souvent dans le rock. C’est en fait une version accélérée du « Hoochie Coochie Man » de Muddy Waters et le riff de début permet au public de scander « Angus ! Angus ! » entre les pauses de la guitare, un rituel depuis devenu inévitable. Et puis Bon nous raconte cette conquête féminine totalement insatiable, cette Rosie aux mensurations gargantuesques qui vit en Tasmanie et se révèle une incroyable prédatrice au lit. Encore plus graveleux, « The Jack » se veut le récit (véridique) de la façon dont les musiciens ont contracté une méchante blennorragie (le fameux « Jack » dont il est question) à cause d’une groupie pas aussi vierge qu’elle le prétend. Alors que l’audience reprend en chœur le refrain « She’s got the jack » et que Bon lance au public «Any virgins in Glasgow ? », Angus se lance dans un strip-tease à la fin duquel il dévoile un caleçon…aux couleurs du drapeau écossais, hommage aux fans locaux ! Il nous sort aussi un solo bluesy qui démontre l’importance de ses racines et qui donne des sueurs froides même aux guitaristes émérites.

Au programme ce soir-là, d’autres petites merveilles du AC/DC 1ère période, des morceaux qui n’apparaissent plus que ponctuellement en concert aujourd’hui comme « Hell ain’t a bad place to be », « Bad Boy Boogie » ou encore « Problem Child » et « Rocker ». Tout est joué à 200 à l’heure, pas une seconde de trop, mais avec un feeling extraordinaire et il faut saluer ici le travail remarquable des 3 hommes de l’ombre, alors que Angus et Bon sont devant et prennent la lumière : Malcolm Young (architecte indétrônable du « son AC/DC »), et la rythmique métronomique formée par Phil Rudd et Cliff Williams. Écoutez juste la basse sur « Let there be rock », on sent presque le sol de la scène vibrer ! Et attention, les 2 showmen que sont Angus et Bon connaissent parfaitement leur affaire, il suffit de regarder les extraits de ce concert disponibles dans les DVD « Family Jewels » et « Plug me in » : même quand Angus arpente la salle sur les épaules de Bon, sa technique et sa précision demeurent irréprochables, c’est à ça qu’on reconnaît les grands musiciens. Ce live est un incontournable, une profession de foi, un résumé de ce que le rock’n’roll devrait toujours être : puissant, festif et généreux. À noter une pochette fantastique qui résume bien l’affaire avec un Angus dont la Gibson SG est plantée dans le ventre, des traces de sang parsemant sa chemise d’écolier alors que Bon le soutient avec un regard démoniaque ! De nombreux live de la période Brian Johnson sont sortis depuis les années 90 mais c’est le seul officiel qu’on possède la période Bon Scott (avec celui de Paris 79 dans le coffret « Bonfire »). Il existe par contre pas mal d’enregistrements non officiels pour les radios qu’il est facile de se procurer. Mais aucun n’approche de la fureur de ce live. Juste un point en moins car j’aurais juste bien repris un peu de rab ! Mais il semblerait que ce soit la presque intégralité du concert de Glasgow qui ait été gardée.

JOE-ROBERTS
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le 19 févr. 2025

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