Il est loin le temps où l'ermite canadien braillait ses tripes, hurlait ses cauchemars sordides sur fond de folk-grunge. Everything I Long For est sorti 13 ans plus tôt, mais toute personne l'ayant écouté une fois ne peut l'avoir oublié : un vrai traumatisme.
Désormais Hayden est apaisé. Mais sa poésie et son sens de la mélodie n'en sont pas pour autant altérés. Et son Elk-Lake Serenade de 2004 en était jusque là la plus belle preuve, la transition s'étant faite en douceur au travers du dépressif The Closer I Get (1997) jusqu'au classicisme folk assumé de Scryscraper National Park (2001), véritable étape charnière de sa carrière.
Dans Elk-lake Serenade, l'apparition de quelques synthés cheap et de trompettes mariachi enrichissait l'univers de Desser, celui-ci troquant la sécheresse caractéristique de ses deux premiers disques contre une forme d'instrumentation chaleureuse et parfois foisonnante... Tout en gardant une ligne mélodique claire, au pouvoir de séduction intact.
In Field & Town est donc sans surprise le digne successeur de son fameux aîné : chaud, drôlement triste ou tristement drôle, au gré de ses anecdotes toujours aussi attachantes ("The Van Song", "Where And When", "Lonely Security Gard").
On est impressionné par les montées en puissance qui caractérisent certains morceaux ("More Than Alive" et sa guitare enchanteresse, "Did I Wake Up Beside You" et son solo dissonant). Cela démontre une fois de plus que le canadien ne s'est jamais contenté de composer de belles chansons : on peut même dire qu'il ouvre aussi depuis une vingtaine d'années de nombreuses portes pour enrichir l'univers folk.
Mais on est aussi conquis par ses chansons les plus dépouillées, telles les émouvantes "Weight Of The World" ou "The Hardest Part", désarmantes de justesse.
Une fois de plus, Hayden défriche les sentiments humains avec succès. Et même si son premier disque reste (et restera certainement) un chef d'oeuvre inégalable, il demeure toujours au sommet de la pyramide folk, loin devant ses concurrents.