Avec Irish Tour '74, Rory Gallagher tenait son live le plus abouti, absolument jouissif à chaque titre égrené. Non pas que Live in Europe soit passable, il reste un plaisir sans nuage, mais Irish Tour '74 hérite lui des titres dantesques de son album studio phare sorti un an auparavant Tattoo, soit Tatto'd Lady - Millions Miles away - Who's that Coming - et en formidable ouverture Cradle Rock.


Vous avez aimé Tattoo'd Lady version studio dès la première écoute ? Préparez vous à prendre une claque pour sa version concert où Rory Gallagher enchaîne fiévreusement les couplets, comme pressé, pour mieux claquer des solos d'une fureur tranquille, presque posée, pourtant techniquement bluffants d'intensité jamais relâchée, sans jamais oublier la beauté de la ligne mélodique développée à juste vitesse. A Million Miles away ? Une odyssée mélancolique, tempétueuse et grave qui émeut profondément. Cradle Rock ? Une boule d'énergie où le groupe charge avec enthousiasme toute la puissance qu'ils sont capables de générer. J'ai un très léger regret sur l'interprétation de Who's That Coming, intrinsèquement magnifique, qui se passe hélas inexplicablement de l'harmonica de la version studio.


Et le reste alors ? Comme pour tous les lives, Rory Gallagher gratifia à l'époque ses chers compatriotes de titres inédits qui dépotent, tout simplement. Faites vous plaisir avec la guitare sèche folk de As a crow Flies, profitez du blues de la reprise au long cours de I Wonder Who où il s'égare dans un solo démultiplié qui prend aux tripes... Il y en a pour tous les goûts rock folk blues, la qualité de jeu est le fil directeur reliant ce florilège de la tournée 74.


S'il y a bien une constante chez Rory Gallagher, c'est qu'il ne s'autorise aucune esbroufe lors de ses lives. Son talent s'expose le plus simplement du monde, ne vient jamais prendre le pas sur l'expérience globale d'une chanson. Si les titres prennent de l'ampleur et dépassent chacun allègrement les cinq minutes, voire pour certains frôlent les dix - douze, ce n'est jamais en tenant une note quarante secondes ou en déviant du rythme posé pour un aparté incongru. Sa marque de fabrique, bien à l'image de l’humilité du bonhomme, tient justement à fondre sa virtuosité scénique dans une communion avec les musiciens l'accompagnant. Il suffit d'écouter dans le titre Walk On Hot Coal sa guitare nerveuse et étouffée attirer par un solo hypnotisant, tel un charmeur de serpent, batterie et basse jusqu'à ce que le clavier aussi cède à l'appel pour un feu d'artifice final pour saisir l'alchimie qu'il parvient à développer.


Côté prise de son pure, certes, on n'atteint pas la perfection d'un Made in Japan de Deep Purple, mais chaque instrument ressort bien, la foule est tenue en respect (un peu trop peut être) et seule la voix de Rory Gallagher, qui a toujours un peu péché niveau puissance, semble en retrait, rien de gênant cependant.


Si l'album Tattoo est le parfait ambassadeur pour découvrir ce guitariste trop méconnu en dehors des cercles initiés, le live Irish tour '74 est le disque qui vous fera immanquablement tomber amoureux de cet artiste parti trop tôt.

Hypérion
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le 4 févr. 2014

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Hypérion

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