C'est l'histoire d'un mec qui a rongé son frein et qui a peut être cru qu'il ne percerait jamais, un mec pourtant indéniablement fédérateur. C'est l'histoire d'une mixtape dont le concept est de voir ce mec bourriner des prods jusqu'à en faire des petits tas de cendres humides, sauf la dernière, mais en fait quand même un peu, parce que faut pas déconner. C'est l'histoire de vos daronnes qui boivent du sprite sa mère.


A moins d'avoir des problèmes d'audition ou d'être Eric Zemmour, ce qui se remarque tout de suite chez Fianso c'est cette énergie incroyable qu'il peut insuffler dès les premiers ICH ICH. Cette interprétation magmatique me fait dire qu'il appartient à un pedigree de rappeur extrêmement précieux : ce gars qui apparaît qu'une fois tous les 3 ou 4 ans, les chicos qui rayent le parquet et la bave aux lèvres, prêt à bombarder le game de grosses patates de forgeron. Généralement, ce gars n'a d'autre possibilité que de devenir le champion du peuple et, parce que le talent fait bien les choses, Sofiane l'est devenu.


Finalement il me fait un peu penser à Kaaris qui, après des années d'errance dans le ventre mou du classement, est revenu avec un appétit carnassier pour accoucher en 2012 de l'album définissant et définitif de ce que peut être la trap à la française. Alors bon, cette tape est loin d'être un game changer comme Or Noir a pu l'être, ça se veut beaucoup plus old school et classique dans la forme mais, au delà des similitudes de parcours, on y retrouve ce côté Russell Westbrook du rap : la richesse technique semble se cacher derrière la puissance des gros coups de semelle qu'il assène aux visages de ses adversaires, alors que pourtant, c'est bien cette technique qui en est le principal ressort.


Parce que oui, les couplets sont ciselés, souvent très denses. Entre les deux, c'est entamé par des onomatopées brûlants annonçant le carnage, conclu par des refrains protéinés qu'un public se fera une joie d'hurler à ses concerts. Ça invente pas l'eau chaude mais ça marche, peut être pas avec la même intensité à chaque fois (genre on a pas systématiquement envie de sauter à pieds joints sur la tête d'un CRS comme à la fin de l'épisode 10), mais Sofiane prouve qu'on peut compter sur lui quand il s'agit de pilonner chaque phase avec la diplomatie d'un marteau-piqueur. Pour tout dire, c'est souvent les invités qui viennent casser l'ambiance, car rarement au niveau, mention spéciale à Bakyl qui est lui même pas au niveau des mecs pas au niveau... et y'a quand même Kalash Criminel dans les featurings.


Donc voilà, du classique, mais du classique de haute facture, de la violence cousue main j'ai envie de dire. Je sens que l'album à venir sera moins bon que cette tape qui pue la spontanéité, l'authenticité et le nique la musique qui fait des compromis. J'espère me tromper, alors fais moi rêver Fianso.

Yanga
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le 19 mars 2017

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