Il a été souvent dit que King Kong était le premier film hollywoodien pour lequel une musique originale à été composée pour l’intégralité de l'oeuvre. Depuis l’apparition du cinéma sonore quatre ans plus tôt, la grande majorité des films se contentaient de proposer des airs classiques (voire de jazz, ou parfois des chansons) extrêmement connus en guise d’accompagnement. Et si par hasard une musique était spécialement composée pour le film, elle se résumait la plupart du temps à un ou deux morceaux. Max Steiner a ainsi ouvert la voie à ce qui deviendra la musique de films classique, alliant création d'une empathie du spectateur avec les personnages et reconnaissance de celui-ci des thèmes récurrents, leitmotive participant à la correspondance entre les images et les sons, quasi systématique dans un cinéma classique prônant la lisibilité et la clarté avant tout.
Pourtant, quand on le présentait comme l'homme ayant inventé la musique de film, Steiner répondait : « C’est du non-sens. Pour moi l’origine de la musique de film vient de Richard Wagner. Écoutez les arrangements derrière les chants dans ses opéras. Si Wagner avait vécu à notre siècle, il aurait été le premier et le plus grand compositeur de musiques de films. » La particularité de Max Steiner est qu'il était un ancien de l'opéra, d'où l'idée d'inventer la partition originale pour le cinéma (avec un thème pour chaque personnage, des parties dramatiques, d'autres contemplatives... comme à l'opéra mais sans chant).
Une œuvre essentielle non seulement d'un point de vue historique, donc, mais également d'un pur point de vue esthétique. Oscar Levant, acteur mais surtout compositeur de musiques de films dans la première moitié du XXe siècle, a ainsi écrit un jour : « Pleine d’accords bizarres, de bruits et fond stridents, de grognements et de halètements, c’est de toute l’histoire de Hollywood une des partitions écrites avec le plus d’enthousiasme. J’irais même jusqu’à dire que dans la publicité, on aurait dû annoncer un concert sur une musique écrite par Max Steiner, avec un accompagnement visuel à l’écran. »
Bien que cette musique soit orchestrale, utilisant de nombreux instruments et plutôt complexe, on peut ainsi entendre qu'elle se base parfois sur des rythmes primaires (bien que variés), voire tribaux, brutaux, agressifs, dissonants, plutôt que de développer un lyrisme sophistiqué.
Et le mickeymousing, souvent considéré comme un enfantillage, contribue en réalité à CRÉER les sons des émotions, et ainsi à finir de nous emporter.