Après une montée en puissance longue et ponctuée de très bons projets, notamment l'EP avec H JeuneCrack et OMAR CHAPPIER (je suis moins familier avec ce qu'il a fait avant), Mairo dévoile enfin son premier album. Et quel album ; les prods d'Hopital sont ultra variées, et toutes époustouflantes ou presque. De la Baltimore Club (merci la première écoute avec Grünt pour la culture), du rock qui est respecté et très bien fait, du boom-bap... Et surtout, surtout, des prestations au micro comme on en n'entend plus beaucoup.
Le débat pour savoir qui est le meilleur rappeur francophone actuellement est infini et probablement impossible à trancher, mais Mairo est plus que jamais dans la discussion. Les flows, les punchlines, les références, la signature vocale, les rimes, le fond... Tout y est. Et sur le fond (et c'est souvent le signe d'un premier album réussi), beaucoup plus d'introspection et de prises de position que sur les projets précédents. Mairo ne rappe pas juste excellement bien : il a aussi des choses à dire. Sur la Palestine et les injustices, sur l'industrie, sur ses parents et en particulier sa mère, sur l'amour...
Sur le fait de venir de Genève aussi, ce dont il est fier et sur lequel il est intarissable, mais qui lui donne aussi une place particulière. Après l'émergence et l'affirmation des rappeurs "de province", le meilleur rappeur de France vit-il cette fois au pays du chocolat ? C'est bien possible. Et quel bonheur, dans une industrie où on frôle souvent l'intoxication alimentaire en termes de collaborations vues et revues avec les dix mêmes personnes, de voir un 12 titres (je ne compte pas l'interlude) efficace et surtout sans feat. Et pour cause : Mairo n'a besoin de personne d'autre pour tenir notre oreille éveillée pendant 37 minutes (et à la fin, on a vite envie de le relancer).
En bref, un projet avec rien à jeter, et un rappeur et un producteur au sommet de leurs arts respectifs (jusqu'à ce qu'ils fassent mieux avec le prochain). Probablement l'album de l'année, sans conteste un des albums de rap français de la décennie, et à mon avis un album qui passera l'épreuve du temps et dont on parlera avec nostalgie en 2035. Chapeau bas.