Crever, c’est comme baiser.*
Évidemment, il y a des fulgurances, des premières œuvres grandioses, magistrales ; que ce soit des films comme l'Enfance d'Ivan ou A bout de souffle, des premiers livres comme V. ou même des albums comme celui du Velvet Underground ; mais pas chez Daniel Darc. Malgré le début de carrière douteux mais remarqué de Taxi Girl, personne ne donnait bien cher de sa peau ; même pas lui d'ailleurs ; il en aura fallu des coups de couteaux et des tatouages, des overdoses réussies et des tentatives ratées pour en arriver là ; il aura fallu des gens comme Jacno d'abord puis Fréderic Lo pour sortir Daniel de ses prisons. Il fallait une vie pour en arriver là, pour qu'existe un jour ce parfait album de fin. (J'aurais bien aimé écrire fin en italique, mais je ne sais pas trop pourquoi.) La première chanson d'ailleurs, n'est pas terrible.
Évidemment, ça ne sera jamais un très grand album, une fin parfaite ce n'est de toutes façons jamais très beau - mais je vous épargne mes détails. C'est un peu le bordel cet album ; Darc pioche avec avidité de tous les côtés, des fois on dirait du Gainsbourg, à un moment il est une étrange créature Marvel ou un héros oublié des Enfants du Paradis et il y a toujours Dieu, ce Dieu omniprésent depuis le début de sa carrière solo ; dans ce grand bazar pas mal autobiographique, on trouve pêle-mêle des balades, un genre de tubes, des égarements enregistrés à vif et même une prières. Mais ça a toujours été comme ça. T'as vu sa gueule ? t'as vu ses bras ?
Évidemment, je m'éparpille et je ne parle pas de musique ; c'est tout moi. Cette fois, ceci dit, je n'ai pas grand chose à en dire. Au sens large et infini de la musique, c'est de la chanson française, avec textes nuls et magnifiques éparpillés sur une ambiance délicate et mélancolique. Vous pourriez écouter C'est moi le printemps, qui passait même à la radio, vous pourriez écouter La taille de mon âme, étrange poème désespéré qui donne son titre à l'album, vous pourriez écouter tout l'album d'ailleurs, faire un effort, ou peut-être vous contenter de cette chanson merveilleuse, ma préférée et une des plus belles de sa carrière Quelqu'un qui n'a pas besoin de moi. Ou juste la fin, Sois sanctifié. Prière ultime.
Un jour, je l'ai vu en concert, c'était affreux, pour plusieurs raisons ; terrifiant mais beau. Lamentable aussi. Quelque de chose de parfait était déjà en train de s'éteindre.
(*C’est pas parce qu’on a envie qu’il faut le faire tout de suite.)