Inlassablement, le cinéma de Wes Anderson est parfait. Il est même de plus en plus parfait. Et pourtant, je ne suis pas sûr d'aimer de plus en plus ces films.
Déjà, depuis un moment, ses notes baissent, avec les mecs dans le train, avec les gamins en vadrouille, j'avais un peu perdu la foi. Je ne m'amusais plus beaucoup. Ici, je me suis beaucoup amusé, mais je crois que je ne suis plus touché. The Grand Budapest Hotel, c'est un James Bond, un film d'évasion de prison, de courses poursuites, et tout ça est mis en scène avec une grande beauté, avec des acteurs parfaits, des acteurs que tu reconnais comme dans une grande famille que tu aimes bien, toujours les mêmes. Wes Anderson, qui ne tournait qu'avec ses amis a désormais trop d'amis, il n'ose plus créer un rôle sans l'attribuer à un ami, et ils ont tous l'air un peu enchanté un peu blasé de ne dire qu'une ligne avec le sourire. Eux aussi, ils se sont lassés, non ? D'ailleurs, c'est dommage, les acteurs ne jouent plus, j'ai mis un moment à m'en rendre compte, mais je crois qu'il n'y a plus de jeu d'acteur, il y a bien des récitations, ils mettent le ton, pincé, chic, propre, de la poésie, de longues tirades narratives, tout ça est si beau. Mais bon.
Mais bon ? Je m'égare avec cette histoire d'acteur. Je me mets à dire du mal alors qu'au final, je me suis bien amusé, même si rien ne change, il y a toujours des trouvailles, qui sont bien obligées, elles, de se renouveler un peu. Est-ce que voir à chaque film un orque bondir pour dévorer une sardine ça m'amuserait ? Non, bien sûr. Il y a des poussées de violences, des contre-emplois, des courses poursuites, des impressions soudaines d'immensités, qui sont plaisantes comme tout. Et une histoire aussi, un scénario - d'après Zweig, j'ai ri, un peu, comme à toutes les autres petites drôleries - légers, légers, si légers. Tout est tellement léger. Avant la légèreté s'inscrivait dans un contexte touchant, triste, parfois jusqu'au dégoût, rappelez-vous ces mecs, toujours dans leur train ; les films volaient tendus, intenses, toujours au bord de la crise, tout ça c'est fini : légèreté, rire, amusement au programme. La fin est là dès le début, partout. Et tout se referme, et se referme sur lui-même.
Youpi.
Tu es content ? Moi aussi.
Un peu déçu ? Moi aussi.
Alors que tout est si parfait.