Chapitre 4 : La violence et l’ennui



Successeur logique d’un acharnement thérapeutique à se pâmer d’extase annihilatrice : je perdais le fil de ma vie.


Je transhumai ma condition, je conspuais le réel, subtilement me foutais un crêpe de lin beige sur les yeux, pour n’y plus voir qu’en dedans.


N’y avait-il plus que lui, plus qu’elle, qui me recouvraient, m’asphaltaient les sens pour n’y plus voir plus rien, ni roseaux ni séné… Et il s’en doutait, me blessait sporadiquement à le faire ressurgir :



Tu en as déjà connu, toi… Tu peux les évoquer ?



Oui, j’en avais déjà connu ; une dryade dont je ne peux pas plus parler, j’y tiens trop et en garde toutes les inspirations retenues pour moi et elle. Je la conserve pour le titre, et pour mes illusions dans ma tête embrumée de soir conquis, qui m’éprennent longuement.


Il avait choisi les armes : le manuscrit et Parker. Il avait choisi la douceur aussi, guimauve encarossée de miel ; pour lutter contre le fanion noir qui me venait à la tête…


Car il m’injuriait en même temps ; pour mon bien sans doute, je n’y voyais pas plus loin que la parure des insultes : Pouacre qui fait dans le quatrain, damné, dactylographe… Merde bâtarde, aussi, laissant deviner une plume chancelante ? Une inspiration à bout de souffle sardonique et lyrique, je faisais maigre.


Je donnais à voir auparavant du bariolé et du triolet, et n’y voyait plus que le Blanc et Noir, la bonté hebdomadaire du sourire gratuit et social ; cependant, ce n’était que l’ennui… La violence était ailleurs.


La violence, tu la trouvais dans cette boîte timbrée, où s’encroûtent aussi bien les Hosannas sectaires que les indigos publicitaires et les annonces re-numérées… Ô, la douceur, la charmante, jamais ; Ô grand jamais, tu fais les pires déçus, les plus grandes frustrations, celles qui donnent à pleurer seul, ce qui est naturel, et qui gêne pourtant. Une goulée de lettres seule m’aurait mis aux anges ; à l’instar des comètes, on m’a jeté dans un océan noirâtre où mon seul avenir semblait l’extinction.


La déception fait la vie ? La souffrance grave le corps ; on ne vit pas tant qu’on n’est pas soumis à toutes les déchirures du monde, tant qu’on ne se place pas dans ce désert, ce plan d’immanence où viendront sans retenue, sans silence salvateur et mauve, ou fauve, nous juger et nous caser tous les autres, de leur vue particulière, pour faire de toi un particulier. C’est avec les autres qu’il faut tempérer, s’offrir au compte-goutte, pour n’en pas perdre une miette, pour cesser de bouder dans son coin en en oubliant de vivre ; pas de se plier, pas de faire plaisir, mais de se confronter et d’en sortir. Grandis, nous l’ignorons ; ils le disent, vous le croirez ?


‘Las, j’étais un homme pressé, et lors je n’y songeai pas à l’instant, le Temps croyais-je s’échappait trop sveltement pour m’y résoudre, et cette rupture me taraudait sans échappatoire visible à mon miroir personnel. Je m’aveuglai de bons principes, et le tort venait alors des autres.



Je suis de la planète, mais je veux l’ignorer.



Pouacre qui fait dans le quatrain… En y repensant, je n’y croyais pas. Ferré m’avait lâché, mais il reviendra vers moi, non ?

Rainure
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le 3 mai 2016

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