Il l’avait dit, il l’a fait : Carpenter Brut (Frank pour les intimes) nous a gratifié d’un album rétro. Très rétro. Souvent kitsch, mais sans jamais verser dans la caricature, il a réussi à insuffler un nouveau souffle après le tour de force que constituait la genèse de son oeuvre, le magistral Trilogy.
Beaucoup plus en phase avec la période qu’il prétend couvrir (« la période post-hippie, pré-sida » comme est indiquée sur son site…), CB n’en a pas pour autant délaissé ces sons saturés ultra frénétiques qui ont fait sa marque de fabrique lors de ses trois premiers EP. En témoignent les puissants Hairspray Hurricane et Leather Teeth où ils continuent à retentir comme autant de coups de fusil à pompe dans la gueule de zombies-aliens métamorphes venus sur Terre pour abuser de nous psychiquement dans un trip consumériste (j’invente rien, c’est l’intrigue de They Live, film d’un certain…John Carpenter).
Si on pouvait relier ses premières œuvres à un monde dystopique et aride sans foi ni loi, cet album renvoie davantage aux nanars des eighties avec ses synthés qui puent le disco commercial d’alors et ses riffs métal qui induisent obligatoirement un headbanging irrépressible. Les huit titres sont ici plus balancés que sur les précédents albums, entre mélodies lénifiantes et envoûtantes (les vocals n’y sont pas étrangers), et beats enivrants et effrénés.
Et cette variété est bien plus propice à la création d’un imaginaire filmique auquel CB fait référence autour de son projet musical. A force d’agrémenter ses partitions de vidéos, sons et images se sont nourris mutuellement dans une visée quasi démiurgique. Ecouter Leather Teeth équivaut à se plonger dans une ambiance où se côtoient bikers moustachus en Harley Davidson et armés jusqu’aux dents, et jeunes filles délurées en patins à roulettes se déhanchant sur le dernier Blondie.
Il en arrive presque à rendre nostalgique un public qui n’a, pour la majeure partie, jamais connu cette période.