Difficile d'écrire une critique sur un album sorti il y a à peine plus d'une demie journée sans risque de dire à la fois tout et rien, de brasser de l'air et chanter des louanges qu'on regretterait amèrement quelques centaines d'heures plus tard.


OUI MAIS. Rien n'empêche d'écrire mon ressenti :


  • Cet album est à contre-courant de l'époque actuelle, dans laquelle la musique est devenu plus que jamais un produit de consommation, où chaque album qui sort est un bien fongible que l'on substitue d'une semaine à l'autre à la sortie la plus récente, sans prendre le temps de laisser vivre la galette, de la laisser se frayer un chemin en nous comme dans les charts, de la laisser vivre en résumé ;
  • Cet album est à contre-courant car il prend son temps, n'hésite pas à alterner des morceaux qui cognent (N95) et des morceaux plus doux (Die Hard), il prend le temps de nous raconter son auteur et nous enveloppe de rythmes divers et variés, tantôt proches du Jazz, tantôt du R&B, tantôt de la pop, sans jamais que la démarche ne paraisse grossière ou forcée, le disque fourmilliant de détails et réflétant le perfectionnisme maladif de l'artiste qui le porte ;
  • Cet album est à contre-courant car il privilégie des pistes longues, étirant les minutes sans jamais ennuyer, à une époque où les artistes favorisent les morceaux courts, la fameuse recette "refrain-couplet-refrain-couplet-refrain-fin" qui permet de maximiser la "replay value" et garantir d'énormes scores en streams synonymes de certifications toujours plus artificielles ;
  • Cet album est à contre-courant car il raconte quelque chose, à une époque où l'on privilégie l'expression en 140 caractères et les phrases choc pour capter et retenir une audience toujours plus friante des petites phrases et moins des bons mots, des belles phrases et des grandes formules, l'auteur qu'est Kendrick Lamar n'est pas effrayé à l'idée de nous proposer une pièce de théâtre en musique (We cry together).

Pour conclure, cet album est riche. Riche musicalement, riche rapologiquement, riche de l'évolution d'un artiste que nous avons plaisir à retrouver après 5 ans d'une absence qui commençait à peser sur chacun de nous. Ce disque est une magnifique synthèse de la carrière de K.Dot, on y trouve pêle-mêle des éléments de Section.80, Good Kid M.a.a.d City, To Pimp A Butterfly & Damn qui dansent harmonieusement pour saluer Top Dawg Entertainement qui éditait ici le dernier album du virtuose californien.


Mon Dieu ce que c'est bon.

sauronlannister
9
Écrit par

Créée

le 13 mai 2022

Critique lue 864 fois

21 j'aime

1 commentaire

Critique lue 864 fois

21
1

D'autres avis sur Mr. Morale & the Big Steppers

Mr. Morale & the Big Steppers
Tricia_Takanawa
1

La Fouine vs Laouni

Attention, critique assassine mais je vais tenté d'être correct.Déjà, l'album se veux être (à en croire la démarche et les critiques) en avance musicalement sur son temps (comme pour damn et les...

le 15 juin 2022

11 j'aime

Mr. Morale & the Big Steppers
Aur3l
8

King is Back !

Le statut de Kendrick est très particulier.Cet homme a sorti deux des plus grands albums de hip-hop des années 2010 (GKMC et TPAB) et a connu un succès mondial grâce à ces classiques. Ses flows et...

le 13 mai 2022

7 j'aime

Mr. Morale & the Big Steppers
rapchroniques
9

Enfin de retour!

Enfin il est de retour! Après cinq ans d'absence avec la sortie de Damn, Kendrick revient pour sortir son dernier album chez TDE: Mr. Morale & the Big Steppers, projet en deux parties (j'aurais...

le 20 juil. 2022

4 j'aime

Du même critique

Mr. Morale & the Big Steppers
sauronlannister
9

Un contre-courant rafraîchissant

Difficile d'écrire une critique sur un album sorti il y a à peine plus d'une demie journée sans risque de dire à la fois tout et rien, de brasser de l'air et chanter des louanges qu'on regretterait...

le 13 mai 2022

21 j'aime

1

L’Étrange Histoire de Mr. Anderson
sauronlannister
9

Entre rêve et ultraviolence : le nouveau trip incroyable de Laylow

Après nous avoir entraîné dans les affres d'une société digitalisée où les cœurs battaient au rythme des basses, où le ciel, noir, était pollué par les pixels des hologrammes, dans ce qui constituait...

le 16 juil. 2021

13 j'aime

La Fête est finie
sauronlannister
5

La fête est finie : mention passable ?

Mon histoire avec Orelsan est très complexe et faite de grands moments d’amours et de grands moments d’ignorance totale. Quand est sorti son premier album, Perdu d’avance, j’avais 15 ans et les...

le 20 oct. 2017

10 j'aime

2