Looking downtown for the minimum wage
Neon Bible, c'est pour moi un album plein de souvenirs.
Trois ans après l'immense Funeral, à la puissance émotionnelle dévastatrice, la bande de Montréal nous revient avec un album à l'ambiance radicalement différente.
Déjà ici, il n'y a pas de concept à proprement parler, juste des morceaux n'ayant pas vraiment de liens entre eux. Ensuite, ici, fini le climat morose et grisâtre des mégalopoles, passons à des morceaux plus variés, aux ambiances diverses. Malgré l'opening un peu bizarre de l'album ("Black Mirror"), on comprend tout de suite après, avec "Keep the Car Running", que nos musiciens ont définitivement tourné la page. Cependant, ne vous hâtez pas, il y a tout de même certains morceaux qui ont gardé une atmosphère vraiment triste et désespérée ("Neon Bible", "Bad Vibrations", le transcendant "Ocean of Noise", ou encore "Windowsill" et "My Body is a Cage").
Au final, l'album est un parfait mélange de morceaux tristes et de morceaux plus légers. Si je dis quelquefois (à mon insu) que l'album est dans l'ensemble joyeux, c'est parce que pour moi, les morceaux les plus expressifs, les plus réussis sont les morceaux joyeux (essayez de ne pas sourire en écoutant "Intervention"). Attention, les morceaux en question ont justement des paroles tristes (d'ailleurs le "working for the church while your family dies" sur "Intervention" est une allusion à l'hécatombe familiale qu'ont subi certains membres du groupe en 2004, déjà longuement narrée sur Funeral).
Les musiciens essayent aussi des styles plus diversifiés que sur l'album précédent : rock 50's avec "Antichrist Television Blues", valse dépressive à la fin de "The Well and the Lighthouse" qui contraste nettement avec le début du morceau, gospel avec orgue d'église sur "Intervention" ...
A noter également que nos canadiens savent toujours aussi bien écrire leurs paroles. La différence avec Funeral, c'est qu'ici certains morceaux ont des paroles abstraites, sans trop de sens (l'étrange rêve de "Keep the Car Running", le monde écolo de "No Cars Go"), mais toujours aussi faciles à retenir et a chanter.
Après une étape difficile et pourtant jouissive pour l'auditeur, Arcade Fire nous donne ici un aperçu plus étendu de leur talent, grâce à des mélodies accrocheuses et génialement arrangées. Un album immense, incroyable, génialissime, les mots me manquent ...
J'aimerai revenir un dernier instant sur la première phrase de cette chronique (y'a plus rien d'intéressant, vous pouvez partir), à propos de mes souvenirs. Je crois que "Neon Bible" est l'album que j'ai le plus écouté en conduisant, à travers la ville ou la campagne. A l'époque où je commençais tout juste à conduire, je le prenais à chaque fois dans la voiture. Et quand je l'écoute maintenant, je me souviens avec nostalgie de toutes ces heures passées sur la route. C'était la minute inintéressante, merci d'avoir lu.