Booba dans son terrain de jeu

Depuis quelques années, aucun album de notre Boss du Rap Game national n’a fait l’unanimité auprès du public. Aucun ! Entre les puristes allergiques aux expériences mélodiques de Booba et à l’utilisation excessive d’autotune et ceux qui vénèrent l’artiste accompli, il y a souvent un fossé difficilement surmontable.

Booba ? Plus de 20 ans de carrière, une marque textile, un site internet, 8 albums solo, des mixtapes à n’en plus finir et un palmarès évidemment ponctué de Hits et de Street Bangerz à la pelle. Peu importe qui vous êtes, quel âge vous avez, où vous vivez. Si vous vous considérez comme amateur(trice) de Rap français, il y a forcément un titre du DUC de Boulogne qui vous a marqué.

Il vous a peut-être plus touché à l’époque de Lunatic avec des classiques tels que « Le Crime Paie » ou plus récemment avec son album Futur et son légendaire « Kalash » en featuring avec son nouvel ennemi Kaaris, quoi qu’il en soit, il aura marqué toute une génération. Booba donne l’heure dans ce jeu, que ça nous plaise ou non. Aujourd’hui il revient avec le très sombre Nero Nemesis et vous n’êtes pas au bout de vos surprises.

Booba sort les griffes

Deux albums dans la même année, c’est la première fois qu’il ose le faire. Une stratégie aussi déstabilisante que puérile vient annoncer un projet sensiblement conforme au calendrier de la concurrence. Était-ce déjà prévu depuis longtemps ? A-t-il voulu saboter la sortie de l’album de Rohff dont il se moque sans retenue sur les réseaux sociaux ? Était-ce pour booster son Bercy prévu le lendemain ? Aucune idée et franchement on s’en fiche considérablement. Ce que nous avons entendu, nous ne l’espérions plus. Nous en avions rêvé, Booba l’a fait ! Il est de retour, et de la meilleure des manières qui soit.

Booba sait encore kicker ! Oui oui, vous avez bien lu : BOOBA SAIT ENCORE KICKER. Même si nous n’en avions jamais douté, sa nonchalance était évidente (et parfois franchement énervante), sur des sons « sans forcer ». Pourquoi faire compliqué quand la simplicité du fond sur une forme tendance marche du tonnerre ? Tout simplement parce que l’envie du public de retrouver le B2O d’antan devenait de plus en plus conséquente. Visiblement, il a lu nos tweets, entendu nos requêtes et il a su réagir en conséquence.

Première nuance entre Nero Nemesis et les précédents albums : fin des featurings VIP ! Booba a choisi des artistes de son label ou de son entourage proche. Il avait déjà secoué la sphère avec le très dansant « Validée » repris à Sidiki Diabate, en featuring avec Benash (ex membre du groupe 40K Gang). On retrouve ce dernier postiché entre B2O et Siboy sur « Zer ». Mention spéciale pour le couplet de Booba dans ce morceau, qui s’avère être subtilement bien écrit et puissant, l’un des meilleurs de l’album sur une prod’ du talentueux Souleyman Beats. Côté featuring, Gato Da Bato et Damso donnent le ton dans « Pinocchio ». Autre nouveauté, des collaborations successives et rapprochées dans le temps avec le duo Twinsmatic sur « Talion » et « U2K » qui viennent enrichir l’album de sonorités outre-Atlantique, qu’on retrouve également sur le mélodieux « Charbon », produit par Bone Collector.

Le vocoder est mort, vive le vocoder

Beaucoup de nouveautés et de bonnes surprises en somme. Nous avons également la chance de retrouver des sonorités familières en guise de ponctuation, avec « Attila » et « Génération Assassin » dont les clips respectifs n’avaient laissé personne indifférent, notamment de par la présence de Rockin’ Squat dans l’un d’eux.

La combinaision autotune / Booba, nous la trouvons presque vomitive à force. D’ailleurs « Habibi » serait peut-être le seul et unique track de trop, sans grand intérêt si ce n’est la prod’ totalement dingue de Grant Decouto. Nous disions donc, autotune/Booba, résultat écœurant à force d’en avoir trop ingurgité. Oui, mais en fait non. C’était vrai jusqu’à l’écoute de « 92i Veyron » qui nous a poussé à changer d’avis illico presto. Une prod’ totalement lunaire d’ Xplosive Beats, une plume solide en guise de support à la légèreté du vocodeur omniprésent. Un paradoxe digne du plus grand intérêt que nous n’avions pas eu la chance de découvrir auparavant malgré toutes les tentatives du Duc.

Nous finirons en mettant en avant notre top 3 de l’album : « Comme Les Autres », « Walabok » et « 4G », respectivement produits par Zewone, 1712 Beatz et Punisher qui viennent confirmer, appuyer, accentuer la réussite de cet album. « Comme Les Autres » ou autrement dit, le combo parfait de tout ce que nous apprécions chez Booba, ni plus ni moins. « Walabok » est l’introduction de l’album et en annonce clairement la couleur. À contrario, « 4G » est la conclusion du projet, qu’on assimile à une éventuelle suite du célèbre « 3G ».

De la Trap (oui, encore) mais bien réalisée sur le domaine de prédilection de B2O, son terrain de jeu par excellence : l'egotrip. Dans ce domaine, rares sont ceux qui peuvent prétendre atteindre son niveau. La concurrence existe, au sens large du terme mais une chose est sûre : quand Booba prendra sa retraite et posera le mic' définitivement, plus rien ne sera pareil.

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