Rentrée 1991. Je me rends compte qu'un camarade de classe écoute le dernier album de Lenny Kravitz dans son Walkman, ayant reconnu le solo de Slash dans Always On The Run qui s'échappait de son casque. Aussitôt je lui saute dessus et je lui demande s'il veut bien m'en faire une copie. Il me répond OK à condition que je lui fournisse une K7 audio enregistrable. Ni une, ni deux, je file le soir même à la FNAC, et investit 20 francs dans un lot de 2 K7 BASF Chrome de 90 minutes en promotion. Sans même l'avoir déballé, je confie les deux K7 au poto en lui disant de m'enregistrer quelque chose de sympa sur la seconde K7...
Voilà comment je me retrouve avec Nevermind entre les oreilles... A la première écoute, je me prends une claque monumentale : ce n'est pas que je trouve cela génial, mais la rage, le désenchantement, le cynisme, et l'anticonformisme transpirent tellement de cet album que je me suis dit que ces petits gars que je ne connaissais pas l'avaient composé pour moi. Quand mon pote me demande ce que je pense de cet album, je lui réponds alors que musicalement je ne trouve pas cela extraordinaire (j'étais à l'époque un aficionado des guitar heroes), mais que j'aimais beaucoup, car l'époque était alors pour moi à la rébellion par rapport à ce qui cartonnait musicalement en France. Si je trouve que ce n'est pas génial, c'est que si vous vous amusez à chanter à cappella toutes les chansons de l'album en remplaçant les paroles par "la la la", vous aurez l'impression de chanter des comptines pour tout-petit... ^^
Malgré cela, cet album est immédiatement devenu incontournable pour moi ! Il faut remettre les choses dans le contexte : cela faisait deux ans que je constatais, effaré, que des "trucs" comme Lagaf, Bézu, Les Musclés, Les inconnus, Patrick Sébastien, Benny B, les megamix à toutes les sauces (Argh les Vagabonds :-S), Patrick Bruel, Barbelivien/Gray, les danses de l'été (Lambada, Soca Dance, Saga Africa... brrr :-D ), Jean-Pierre François, Lova Moor (et j'en oublie) marchaient beaucoup mieux que les Pixies, Metallica, Guns N' Roses ou Queen.
Et le pire était venir : Jordy, Hélène et les garçons, Beverly Hills, la mort de Freddie...
Ajoutez à cela que j'atteignais ma majorité et que pour la première fois, je ne vivais plus chez mes parents, étant donc confronté aux dures réalités et aux injustices de la vie pour la première fois, et vous pourrez avoir une vague idée de mon état d'esprit de l'époque (a-t-il vraiment changé d'ailleurs ? :-D )
Tout ça pour dire qu'écouter cet album aura été, jusqu'à ce que le premier album de Rage Against The Machine parvienne à mes oreilles 4 ans plus tard, un exutoire parfait.
Pourtant, il est difficile de comprendre ce que Kurt chantait, pas seulement parce que ce qu'il chantait pouvait paraître n'avoir ni queue ni tête, mais surtout parce qu'il bouffait la moitié des mots ! :-D
Mais peu importe, pour moi, plus que de la musique ou de la poésie, Nevermind est un feeling ! Que je retrouve dès les premiers riffs de Smells Like Teen Spirit ! Cette chanson, personnellement, représente la sensation que j'avais de ne pas être en phase avec les jeunes "normaux" et la rage que cela engendrait en moi. Vu comment elle a cartonné, je n'étais pas si seul que ça ! :-D
In A Bloom est une chanson d'un cynisme réjouissant, où Kurt se moque des gens qui pourraient aimer son groupe, sans justification rationnelle bien entendu, enfin c'est comme ça que je l'interprète ! :-D
Come As You Are représente, toujours pour moi, une revendication de l'affirmation de l'identité propre à chacun, un hymne la différence. Ça m'a plié de voir qu'il y a quelques années, McDo a repris ce slogan pour ses pubs ! :-D
Breed : totalement nihiliste :-D
Lithium : chanson cynique et/ou ironique sur les gens qui trouvent leur béatitude dans la religion
Polly : chanson extrêmement dérangeante sur un gars qui a asservi une femme nommée Polly. Ça me rappelle, en infiniment mieux, la chanson Phantasmes d'Axel Bauer.
Territorial Pissings : la chanson misanthrope :-D
Drain You : chanson d'amour sale :-D
Lounge Act : une chanson qui me rendait heureux (ironie) après une séparation ;-) Pour l'anecdote, avant que je n'achète le CD, je ne connaissais cette chanson que tronquée vu que mon pote avait enregistré ma K7 en mode fainéant, en utilisant l'auto-reverse ! :-D
Stay Away : la chanson punk par excellence ! Finir une chanson par God is gay ! Il faudrait être suicidaire pour le chanter sur tous les toits aujourd'hui ! :-D
On A Plain : la preuve que la drogue... :-D
Something In The Way : je suis la plus sombre merde qui soit... :-D
Endless, Nameless : la chanson cachée que l'on peut entendre sur la plage CD de Something In The Way, 10 minutes après la fin de celle-ci ce qui était un procédé pour rendre ennuyeux la duplication sur une K7, je ne l'ai donc découverte que lorsque j'ai acheté le CD ^^
Pour résumer, cet album ne respire pas la joie de vivre, loin de là, mais comme le chantera plus tard Garbage, le groupe de Butch Vig qui a produit Nevermind, "I'm only happy when it rains" ^^
À suivre ? ^^