En tant qu'auteur, je me passionne vraiment pour l'exploration urbaine. La première fois que j'ai visité Saint-Malo, j'avais déjà tout le Lore du prochain épisode de ma future publication. Toute l'essence d'une grande aventure de pirates étaient imprégnée de façon remarquable dans la pierre ainsi que les contrées environnantes du port. Mais à cette époque, je n'écoutais pas vraiment Alestorm, comme beaucoup aujourd'hui, je considérais ce groupe comme profondément répétitif, dont l'écoute intégrale d'un album complet devenait rapidement soûlante. Mais une fois encore, à cette époque, je ne m'intéressais pas au groupe. Tout ce que je savais des pirates était concentré dans l’œuvre fascinante « L'île au Trésor » de Stevenson ainsi que la première saison de « Black Sails ». Puis, au fur et à mesure des années, lorsque moi et ma coéquipière d'exploration urbaine continuions à découvrir les ruines de Rennes, nous commencions sérieusement à mieux nous connaître et à découvrir notre amour commun pour l'écriture d'aventures épiques dans des mondes de Fantasy. Puis, c'est lors d'une soirée bien arrosée qu'elle me fit savoir qu'elle avait commencé à écrire une histoire de pirates pour son monde féerique Lysendhal. Tout souriant, je lui répondis de même pour Alphasia. Mais ce soir-là, j'ignorais totalement comment rédiger ce chapitre. La carte du port, reprenant celle de Saint-Malo, ainsi que l'histoire principale étaient déjà travaillés, mais il me manquait la façon de rédiger ce chapitre de ma grande saga. C'est à ce moment que ma coéquipière sortit la bouteille de rhum. En voyant l'étiquette (dont je ne me souviens absolument plus du tout de la marque) j'ai instantanément pensé au titre « Rum » de l'album « Back Though Time ». Je l'ai diffusé pendant qu'on savourait notre première gorgée de Rhum, puis, je lui ai fait découvrir d'autres chansons d'Alestorm et tout est partie à une vitesse folle. C'est alors qu'un déclic me frappa : « Sunset on the Golden Age » n'était même pas encore publié que je m'empressais d'acheter toute la discographie du groupe en me lançant en même temps dans la traduction intégrale de tous leurs textes. C'était long et chiant, les textes et les morceaux sont répétitifs et pas très « fut-fut ». Mais c'était profondément épique, car ce n'est pas que j'avais découvert le groupe Alestorm, mais j'avais découvert l’œuvre artistique de Christopher Bowes (Gloryhammer, ASDFGFA, Spleen, Rumahoy, et probablement d'autres groupes bien bizarres...). Immédiatement, je fus pris de fascination pour le délire de ce mec-là que j'estimais comme étant l'Antoine Daniel du Power Metal... Et enfin, grâce à lui, j'ai pu trouver l'inspiration qui me manquait pour rédiger ce fameux épisode de pirates.
Il avait un titre tout trouvé : « Back Through Space IV : From Golden to Eternity ».
Comme beaucoup, j'étais impatient de la publication de « No Grave But the Sea » en cette fin de mois de Mai.
Comme beaucoup, j'ai été gavé de la promotion grotesque de cet album (trop de chiens).
Comme beaucoup, j'ai adoré l'album que j'ai trouvé vraiment épique (mais trop de chiens).
Comme beaucoup, je considère Alestorm comme un groupe trop surestimé et monstrueusement répétitif.
L'album s'ouvre avec le morceau éponyme de l'album, « No Grave But the Sea » racontant la Bataille des Saintes opposant les forces navales françaises contre celles anglaises, en avril 1782. La France voulant coloniser la Jamaïque (colonie anglaise) en sort perdante. Le morceau est rapide et efficace, aux refrains accrocheurs et épiques mais avec une composition peu ordonnée et trop répétitive au niveau des basses qui semblent clairement chercher leur place. Néanmoins, la rapidité du morceau empêche l'arrivée d'un quelconque ennui et les refrains épiques maintiennent admirablement bien notre tête hors de l'eau. En bref, un simple morceau de mise en bouche pour bien introduire l'album. S'en suit « Mexico ». Ce morceau en soi ne m'a pas vraiment marqué, contrairement au clip qui m'a bien amusé. Le titre s'invite, selon moi, comme une correction du titre précédent. Je veux dire, c'est presque la même composition, mais avec plus de joyeuseté et un bien meilleur équilibre instrumental. Sans plus.
Puis c'est à partir de là qu'arrive le monstre de l'album : « To the End of the World ». En toute honnêteté, c'est un morceau que je rêvais d'entendre de la part d'Alestorm. C'est-à-dire une chanson se voyant comme une véritable fresque épique mariant riffs guerriers, chants narratifs et théâtraux et composition profondément épique et rhapsodique. « To the End of the World » réveille enfin la créativité du groupe en le sortant de sa répétitivité et de son délire « l’alcool, c'est cool ! ». Non, cette fois-ci on a un véritable morceau remarquable dans la même veine que « Death Throes of the TerrorSquad », « Captain Morgan's Revenge » ou encore le fabuleux morceau « Sunset on the Golden Age » (qui, à mon sens, est la plus belle composition de toute la discographie du groupe... oui oui !). On reproche à Alestorm de ne faire que des chansons absurdes sur des histoires loufoques en évoquant de façon abusive l'alcool. Ce morceau va exactement à l'encontre de ces critiques. Il nous emporte dans une quête grandiose à la découverte du bout du monde. L'équipage a découvert un codex ancestral prouvant que la théorie de la terre ronde était absurde, ainsi, la flotte brave tempêtes, batailles et colères divines pour franchir ce fameux « Bout du Monde » et entrer dans l'Histoire. Ce qui fait que le morceau bouleverse la ligne créative basique du groupe, c'est qu'il se construit véritablement comme une rhapsodie aux tonalités diverses et variées rarement (voir jamais) entendues chez Alestorm. La composition musicale accompagne merveilleusement bien l'histoire qui est racontée, elle se construit comme une pièce musicale théâtrale semblable aux grands morceaux narratifs et lyriques que l'on retrouve chez des groupes de Metal Symphonique comme Rhapsody ou encore Pathfinder, et tout cela sans orchestre. « To the End of the World » demeure ainsi probablement le morceau le plus ambitieux de l'album en terme de composition.
Dans un format plus classique, tout en restant efficaces, « Bar Und Imbiss », « Pegleg Potion » et « Man the Pumps » retournent dans du Alestorm traditionnel. Bien que les refrains soient épiques et remplis d'énergies, les couplets se voient dénués d'originalité et se ressemblent sur ces deux morceaux, bien qu'ils soient plus variés sur « Man the Pumps ». Mais la composition se perd totalement, on a presque l'impression que les riffs désordonnés des guitares entrent en jeu uniquement pour combler les vides entre les couplets et refrains, sans vraiment vouloir s'impliquer pleinement dans l'ensemble des morceaux et ne parlons pas des basses qui s'étouffent totalement sauf pour intervenir parfois, à droite ou à gauche, de façon tout à fait aléatoire mais avec énergie notable. Pourtant, « Man the Pumps » reste le plus intéressant de ces trois morceaux jumeaux. Il narre le récit d'un équipage de pirate en pleine quête qui consiste à... vider l'eau de leur navire qui fuit... Malgré l'absence de bataille et d'alcool, le morceau propose une structure musicale particulièrement puissante et énergique qui efface quelque peu les soucis cités un peu plus haut. Mais voilà, le problème de ces morceaux est que leurs lignes vocales mènent trop la danse en écartant une composition instrumentale stable et équilibrée soutenant les chants, celle-ci se retrouve ici totalement désordonnée.
Arrivé à ma moitié de l'album, le rythme est brutalement brisé un « Fucked With an Anchor » un peu plus acoustique. Ce morceau en soit n'est pas un problème, mais il donne la désagréable impression de casser la rythme de l'album. La chanson raconte l'histoire d'un pirate voulant se venger d'un sorcier l'ayant maudis, pour ce faire, il réunit flotte et équipage pour le surprendre en pleine nuit en lui plantant une ancre par un certain orifice. C'est stupide et grotesque, mais venant d'Alestorm, on en a vu d'autres et ça ne surprend plus du tout. Ce qui bloque avec ce morceau est son introduction qui s'oppose catégoriquement au morceau précédent « Bar Und Imbiss » qui s'achevait plutôt bien sur son refrain bien puissant et redoutable. « Fucked With an Anchor » n'a pas la bonne place dans cet album, je pense qu'il aurait du se retrouver en bonus plutôt qu'en plein cœur de la tracklist puisque c'est la chanson qui en sort le plus...
Pour clore son nouveau chapitre, Alestorm nous livre une dernière pépite, « Treasure Island » morceau faisant ode à l’œuvre de Robert Louis Stevenson, un des romans qui m'a si longuement bercé et qui continue encore de nous fasciner. A la première écoute, j'ai été un peu dubitatif. J'avais l'impression d'y trouver les mêmes défauts que sur « Bar Und Imbiss » et « Pegleg Potion », c'est à dire cette présence vocale bien trop dominante qu'elle en éloigne une structure instrumentale équilibrée. Mais je suis tombé sous le charme dès la deuxième écoute. Ce morceau ressemble beaucoup à « To the End of the World » mais avec une atmosphère plus posée et poétique. Ici, Adieu l'absurdité, ce morceau se dévoile comme une véritable chanson poétique pour rendre hommage de façon admirable à l’œuvre littéraire qui a façonné l'imagerie classique de la piraterie que l'on connaît aujourd'hui. Tout s'accompagne merveilleusement bien dans ce morceau, le groupe nous livre une nouvelle pièce maîtresse et unique en son genre, sortant des clichés qu'il s'est lui-même forgé. Parce qu'on connaît surtout Alestorm pour son côté fun grandiloquent et généralement absurde. Mais avec « Treasure Island » le groupe nous prouve une fois de plus qu'il a le potentiel de composer des textes aussi sérieux, poétiques et harmoniques. Le morceau s'achève sur une paisible ligne acoustique nous laissant dessiner un sourire de satisfaction dans cette belle fermeture de l'album.
L'album « No Grave But the Sea » est seulement à la hauteur de ce qu'est Alestorm. Ce n'est pas leur meilleur album, ce choix est trop subjectif. Alestorm continue son long voyage parmi les sept mers aussi puissant qu'il l'a toujours été. L'équipage est toujours là, avec ses défauts mais avec cette volonté de mener à bien l'aventure et de trouver l'or dans le coffre. On pourrait penser que la tempête du grand succès leur aurait monté à la tête et que les léviathans du laissez-aller dans la stupidité auraient eu raison de leur créativité, mais il n'en est rien, il y a toujours de la poudre dans les canons face à la tentation et les sabres de la passion sont toujours bien aiguisés. Fière et puissante, l'armada Alestorm continue sa grande aventure vers d'autres horizons méconnus en quête de probables nouvelles inspirations artistiques le tout en bataillant effroyablement contre les flottes ennemies de la répétitivité et de l'absurdité qui, une fois de plus, ont coulé des membres de l'équipage du Capitaine Chris qui s'enfoncent lentement dans les profondeurs de la mer et qui ne connaîtront jamais le calme de la tombe.
« Un jour, quand apparaîtront les nouvelles aventures et les nouvelles frontières, ils renaîtront de leurs cendres et défieront à nouveau les fureurs de la nature comme les règles des hommes... Et à nouveau, les notables les regarderont risquer leurs vie et défricher les nouvelles routes pour la grandeur de la civilisation... Ils les admireront depuis de belles demeures comme celle-ci. Dégustant les mets délicats et les vins fins en évoquant ceux dont les histoires sont éternelles... Réincarnant ces forbans et le plus grand d'entre eux... Celui qui disparut, mais réussit à ne jamais s'éteindre.
Car on peut tuer l'homme... on n'arrête pas la légende. »
Long John Silver, tome 4 : Guyanacapac, Xavier Dorison & Mathieu Lauffray