Si il y a bien une caractéristique étrange que l'on retrouve chez certaines personnes, c'est le fait de vouloir sans cesse se démarquer de la masse. Elles veulent sortir de l'ordinaire à tout prix, se faire remarquer pour leur originalité.
Certains diront que c'est quelque chose de compréhensible, que l'on retrouve chez beaucoup d'individus. Mais cela reste paradoxal : nous sommes si conformistes et pourtant nous cherchons absolument à prouver que nous ne le sommes pas trop non plus !
Peut-être que ces personnes détestent juste la routine et le conformisme en général. Peut-être cherchent-elles à mettre du piment dans leur vie. Ce qui est tout aussi compréhensible, lorsqu'on s'aperçoit avec horreur que nous vivons une vie impersonnelle.
Marc Almond est l'un de ceux-là. Homme ordinaire avec femme ordinaire. Il n'a pas de faits personnels particuliers à son actif. Il n'est "pas vraiment grand-chose". Il est frustré, il gamberge. Au bord de la crise de nerfs, il décide soudainement de laisser libre court à toutes ses passions. Fin de la routine, début de l'aventure "Non-Stop Erotic Cabaret". Bienvenue dans un monde nocturne et toxicomane.
Nous connaissons tous Soft Cell avec "Tainted Love", tube entêtant et emblème phare des années 80. Mais avez-vous déjà écouté l'album qui allait avec ? Ma grande surprise fut de découvrir que le groupe est loin d'être un one-hit wonder, et que l'album recèle non pas une ou deux mais bien plusieurs pépites synthpop.
Mais, à la différence de bien des albums de ce style, l'ambiance est loin d'être romantique (ou niaise dirons certains).
Films pornographiques en compagnie d'inconnus, sorties dans boîtes sadomasochistes, nuits qui n'en finissent pas et autres pratiques sexuelles considérées comme déviantes par la société, voilà de quoi parlent les morceaux. C'est très rythmé, presque écœurant parfois tellement on a l'impression que cela ne veut pas ralentir. Mais d'un autre côté, l'attention ne décroche pas, car Soft Cell est un groupe particulièrement doué pour les mélodies simples mais efficaces. Elles sont certes répétitives, ce qui peut fortement déplaire à certains. Heureusement, le groupe possède un dernier atout de charme : la voix de Marc Almond.
Presque à lui seul il arrive à construire tout l'univers de l'album. Tour à tour séducteur agressif, gourou apocalyptique ou dominateur au charme incompréhensible, il nous en fait voir de toutes les couleurs. La diversité d'émotions par lesquels il passe ne fait que renforcer l'admiration de l'auditeur pour son talent et sa personnalité bien difficile à saisir.
"Non Stop Erotic Cabaret" est le polaroid parfait d'une époque où le monde de la nuit existait à l'opposé total de celui du jour. Les personnalités changent, s'inversent, les gens respectables se dévergondent. Soft Cell produit un disque bourré d'érotisme certes, mais avec une certaine sincérité déconcertante tant elle est agressive et malsaine. Le groupe possède une personnalité bien à eux, mise en avant bien au-delà du tube "Tainted Love". Et comme l'indique le dernier morceau, le fabuleux "Say Hello, Wave Goodbye", toutes ces déviances ne sont qu'une passade, et nous finissons invariablement par retourner dans notre confortable routine. Néanmoins, les morceaux sont toujours là, et nous pouvons toujours les réécouter au cas où nous avons envie de retourner l'espace de trois quarts d'heure dans cette ambiance unique.