Bâillonnez Thom Yorke.

Je viens juste de l'écouter, en entier, un casque sur les oreilles, sans rien faire d'autre et ce pour la première fois jusqu'au bout sans interruption. Je sens que ça va être un des albums les plus compliqués à critiquer pour moi mais je me lance...
Pour éviter de faire long, je vais droit au but, voilà les 3 points que je tire de cet album mythifié, mystifié, déifié dans la musique moderne par toute la populace mélomaniaque:

- L'instrumental avant-gardiste et très réussi
- Le chant insupportable de Thom Yorke
- Le vieillissement de cet album (et peut-être du reste de Radiohead mais comme je m'y suis pas encore attaqué sérieusement, je ne sais pas encore si ça s'applique au reste de leur musique...)

Cet album déborde d'imagination et de créativité instrumentale, c'est indéniable. L'emploi des nuances électroniques, des effets de guitares, le mixage final, la coordination basse-batterie (notamment sur Paranoid Android) ainsi que l'adéquation de la guitare au reste avec harmonie que ce soit en clean, en overdrive ou en distortion sont autant de points qui ressortent comme une réussite de la part du groupe. Si l'on devait critiquer l'instrumental, je ne verrai que la faible utilisation de la stéréo (enfin, difficile de révolutionner ça après Dark Side Of The Moon...), les solos (ou solis pour les puristes) de guitare qui sont somme toute bateaux, ne présentant rien d'original ni de transcendantal vis à vis de la musique et des émotions (dommage parce que parfois ça suffit à faire un bon morceau) et la guitare folk de Karma Police qui est juste chiante, surtout par ses accords, mais aussi par son côté lourdeau. Si l'on ne devait que regarder ça, cet album aurait eu un joli 8... Ou en tout cas un 7 assuré pour ma part. (La frontière entre le 7 et le 8 étant un des mystères les plus difficiles à cerner dans mes notations, parfois un détail suffit à faire basculer la note entre ces deux charnières... Bref.)

Passons au point n°2: Le chant de Thom Yorke. Si quelqu'un a l'édition muette de OK Computer, j'achète. Thom Yorke, aléatoirement au fil des morceaux, gémit, grince, hésite, geigne, s'ennuie, languit... On dirait un bébé, une mouche ou une vuvuzela selon les moments. Pourtant, c'est pas comme si on avait une longue génération de chanteurs rock ou folk qui arrivaient à nous transmettre des émotions à travers leur voix sans artifices quelconques, pour n'en citer qu'un: Robert Plant. Lui, il gémit sur la moitié de Led Zeppelin I et on a l'impression qu'il jouit en même temps. Ses cris/gémissements sont honnêtes, puissants, vivants. Thom Yorke on dirait un zombie qui chante une chanson pop avec une voix claire. On va me rétorquer qu'il faut changer, qu'il faut être original, etc... Je ne sais toujours pas ce que je préfère entre quelque chose de bien et déjà vu ou d'original mais nul. Et puis Kurt Cobain est déjà passé par là, le chant ado gémissant comme un bébé je m'en foutiste c'est déjà fait. Certes, je vous l'accorde, ici ça va plus loin que ça puisque le cher Thom ne sait ni crier ses poumons, ni placer une seule mélodie entraînante. En fait, ce qui est le plus marquant, c'est qu'après la magie de l'instrumental, on tombe sur cette daube lyrique. Les deux ne vont pas ensemble, c'est évident. Radiohead est un super groupe de post-rock qui a malheureusement engagé un chanteur.

Eh ! Si ça ne s'arrêtait que là, je pense que j'aurai mis 5 ! Mais non, il faut qu'en plus, l'album vieillisse mal et que les gens continuent à le louer ! Bon sang... La chose qui m'horripile le plus dans cet album, c'est de voir combien il a influencé Muse. Et Dieu sait (s'il existe) que Muse est un chef d'oeuvre d'horreur mélodique du point de vue du chant. Je vous jure. Les premiers mots de Thom Yorke m'ont immédiatement rappelé la voix nasillarde et faussement opérette de Matthew Bellamy. Et je sais que c'est une comparaison anachronique, mais pour moi, servir d'inspiration à Muse est déjà presque un crime malgré soi. Thom aurait du leur faire un procès pour plagiat de chant. Si Radiohead avait été seul groupe dans l'histoire à avoir fait ce genre de teinte lyrique, je pense qu'on aurait pardonné leur erreur, mais là non. C'est évident qu'il n'y a pas que ça à retenir du vieillissement d'OK Computer. Presque tout le post-rock de la fin des années 90 à aujourd'hui s'est inspiré de ses atmosphères, sauf que malheureusement pour Radiohead, ils ont fait mieux à plusieurs reprises. En même temps c'est pas dur, du moment qu'on enlève le chant... Ensuite il y a naturellement la "révolution" de l'utilisation des effets électroniques dans le rock (Pink Floyd et les Beatles avaient déjà fait ça ?! Ah bon ?!). Bon ok, c'est juste une remise au goût du jour... Enfin, il y a Apple et No Surprises. Je pense qu'il est inutile de détailler ce point, Steve Jobs a réussi à enlever toute l'émotion subtile qu'il pouvait y avoir dans la mélodie de ce morceau. Radiohead te remercie.

En résumé, trouvez moi la version sans chant, je vous en serait grandement reconnaissant. Mais s'il vous plait, arrêtez de me déifier ce truc. (Je vais être honnête avec moi-même, je vais mettre 5.)