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Crevons le double abcès. Behemoth est sans doute le groupe de métal extrême le plus qualitativement fiable de la dernière décennie. Voilà pour la bonne nouvelle. Pour la moins bonne, on dira qu’il serait fatalement illusoire et, surtout, illusoirement fatal de chercher à égaler The Satanist, apex de leur carrière sculpté en 2014 dans une basalte sombre qui, huit ans plus tard, renferme encore presque tout son mystère.
Est-ce à dire que Opvs Contra Natvram serait frêle, boiteux, dégarni, souffreteux et bossu ? Que nenni, Grand Inquisiteur. Bossu, peut-être, mais juste pour le look, car ce nouvel album est aussi compact et direct que son prédécesseur I Loved You At Your Darkest (2018). La bande de Nergal semble avoir résolu de ramener l’auditeur vers le format plus familier de dix titres pour trois quarts d’heure d’écoute. D’où le rendu très digeste du bousin, dont seul le final Versvs Christvs se permet de dépasser les cinq minutes. Comme pour ajouter encore à cette efficacité, le mixage est au cordeau, que soit sur les percussions tribales de Post-God Nirvana, le cantique occulte de The Deathless Sun, la cavalcade thrash de Off To War!, les arpèges funestes de Once Upon A Pale Horse ou les blast beats convulsés de Malaria Vvlgata. À une époque où le mixage des albums de métal a tendance à friser l’incompétence même chez des grands noms du genre, il est plaisant d’entendre une production aussi lisible et dynamique.
Bien, sûr, gardez-vous de me faire dire de trop vastes conneries. Opvs Contra Natvram n’a rien de la promenade de santé avec de l’ombre, de l’eau, une influenceuse fitness en petite tenue et un chaton en peluche faisant office de repose-pieds. Pour plonger dans les eaux sombres qui vous sont offertes en ces lieux, il vous faudra une bonne tolérance pour le black métal à vocalises de xénomorphe en rut. Même si Behemoth est loin d’être le groupe le plus hermétique de cette scène, le rendu conserve une intégrité formelle qui n’a pas pour but de fourguer la bande-son d’une matinée bingo au club de boulistes du coin. Voilà pour les précautions d’usage. Et bien sûr, vu que je n’oserais jamais glisser des recommandations extérieures dans des articles que vous ne lisez d’ailleurs pas (les malvoyants sont excusés mais les absents ont toujours tort), je ne conseillerai pas du tout à ceux qui seraient réfractaires au métal guttural d’aller étancher leur soif de blues ténébreux du côté de Me and that Man, excellent projet parallèle de Nergal avec John Porter. Non, n’insistez pas, je vous dis. Jamais je ne ferais ça.
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le 20 nov. 2022
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