Titan contre titan

Ces deux concertos sont demeurés célèbres de par le contexte de leur enregistrement, en live, durant la Seconde Guerre mondiale.

Vladimir Horowitz a épousé en 1936 Wanda, la fille du chef d'orchestre italien Arturo Toscanini, et entre les deux hommes de musique, le courant ne passe pas. Toscanini n'apprécie pas le pianiste soviétique et le fait savoir lors de concerts dantesques, où l'orchestre semble en vouloir au soliste au point de le tuer sous des barres de son successivement lancées à son encontre.

Moins perceptible dans le Concerto pour piano no. 1 de Tchaïkovsky, donné à des fins de charité pour réunir des fonds à destination de l'US Army (ce qui explique les bruyants applaudissements entre chaque mouvement !), cette inimitié musicale se révèle pleinement dans le Concerto no. 2 de Brahms. Historiquement une œuvre redoutable pour le soliste, qui doit être sûr de ne pas se faire engloutir par un orchestre dialectiquement omniprésent.

Sous la baguette de Toscanini, cordes et cuivres se transforment en fusils de chasse cherchant à terrasser le clavier d'un Horowitz au maximum de ses capacités. Mais les arpèges répondent sans coup férir aux attaques orchestrales que la prise de son approximative vient décupler à nos oreilles : inconsciemment, ressurgit le tableau expressionniste de cette lutte extraordinaire entre un chef d'orchestre légendaire et un soliste d'exception. Un disque indispensable, dont une seule écoute suffit à éreinter pour la journée !