Rarement eu une relation aussi complexe qu'avec ce disque. Car, je pense qu'on sera tous d'accord sur ce point-là, on parle de relation avec ce disque, et non d'avis. Pourquoi d'ailleurs ? Parce que son charme si étrange fait qu'il se colle, presque systématiquement, à une période ou une histoire précise de notre vécu avec un déterminisme qui colle vraiment à la peau (certains sur ce site me contrediront pas) : sans doute l'un des atouts les plus imparables des musiques acoustiques. Ma relation personnelle à ce disque n'est pas de cet ordre, il ne m'évoque rien de précis. Et, à l'exception de "Pink Moon", je suis absolument incapable de chantonner une mélodie du disque. Je suis également incapable de retenir une chanson précise, comme si l'ensemble du disque était un seul titre aux variances aussi perturbantes qu'un "Tubullar Bells". Or c'est dommage puisque toutes les chansons ont une très courte durée, pour un total de 28 minutes. Compte tenu que les chansons s'appuient pas mal sur leurs paroles, et étant donné que l'anglais m'est aussi familier que Kad Merad chez Kurosawa, je passe pour le moment à côté de son propos, que je sais de toutes façons extrêmement mélancolique. Mais depuis que je l'ai emprunté, je l'écoute quasiment tous les jours. Il me fascine tout de même. Est-ce la délicatesse absolu de son maniement de la guitare ? Sa voix si touchante ? Le calme sinistre qui véhicule une simplicité atteignant les cimes de l'âme ? En tout cas, l'épuration musicale ici rend le disque communicable malgré les barrières. Et c'est très fort. Puisque ça fait que j'écoute ce disque alors qu'il me dérange dans sa construction... Je n'ai pas su quoi en penser pendant un certain temps, et puis je me suis décidé pour 7. Donc un très bon disque, forcément touchant, qui m'a tout de même laissé un peu sur ma faim.
Je l'écouterai, de plus en plus attentivement peut-être, jusqu'à ce que son charme étrange devienne, comme pour vous tous, une odeur spatio-temporelle pour moi. J'attendrai. Et je serai fier qu'un mec comme Nick Drake s'incruste dans mes coulées de souvenance...