1977 : Ian Dury, le jovial – et punk, même si dans un genre qui n’appartient qu’à lui – pose avec un mioche sur la pochette mémorable de son célèbre premier album, "New Boots and Panties" !! La suite appartient à l’histoire.
2017 : quarante ans plus tard, le mioche est devenu grand, et même un artiste presque aussi reconnu que son père, dont il a hérité la voix… spéciale, et surtout, surtout l’humour particulier, et irrésistible. Mais Baxter Dury, en 2017, vient de connaître l’un de ces chagrins d’amour qui changent tout, font tourner la planète à l’envers, et – voyons le bon côté des choses – aident parfois les artistes à créer leurs œuvres les plus touchantes, les plus fortes, les plus universelles…
Sauf qu’avec Baxter, nous avons, nous le savons, affaire à un loustic vraiment pas comme les autres : pas question pour lui de faire dans le sentimental, dans les trémolos, les larmes et tout le tintouin. Ça, ça a déjà été fait des centaines de fois, même dans le Rock’n’Roll (qui a dit : « surtout dans le Rock’n’Roll » ?), et régulièrement très bien. Baxter a pris, et c’est logique quand on connaît son pedigree, le parti d’en rire, de tirer des jurons en bordées, de pratiquer l’exercice tellement anglais de l’auto-ironie, tellement plus élégante que l’auto-complaisance !
Ça commence très, très fort, avec des chœurs féminins, du groove décati et des violons, et Baxter qui envoie la purée : « I don’t think you realise how successful I am / I’m like a shipping tycoon / Full of promise and cum… ». Avant de nous asséner : « I’m the turgid fucked up little goat / Pissing on your fucking hill / And you can’t shit me out / ‘Cos you can’t catch me / ‘Cos you’re so fat / So fuck ya ! ». Bref, ça change des « oh mon amour » de circonstance. La rage, man !
Bon, on ne va pas vous lire toutes les paroles de "Prince of Tears", on va vous laisser les découvrir, et rire, et pleurer, et rager avec Baxter : l’immense plaisir de ce disque aussi léger, court, amusant que fondamentalement puissant, c’est d’écouter Baxter passer par tous les états possibles sans jamais perdre son flegme, son humour qui tue, et finalement ressortir à l’autre bout de cette épreuve… meilleur. Ou en tout cas, ayant survécu. Et avec son meilleur album sous le coude.
On n’imaginait pas que le chagrin d’amour pouvait être aussi réjouissant. [Critique écrite en 2017]
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