Puissant.

Evidemment, ...j'aime («  le grand ») Rage Against The Machine ...comme tout le monde. Et puis j'ai découvert Audioslave au lycée, « la suite » en quelque sorte. ...J'ai bien aimé aussi. Alors, quand j'ai appris (sur le tard) que Prophets Of Rage était composé d'anciens membres de RATM et de rappeurs de Public Enemy et de Cypress Hill, le feu de mon insatiable curiosité a encore été attisé. J'ai tout de suite su une chose : ...que j'irai écouter l'opus à la belle pochette ouvertement révolutionnaire (mais comment en aurait-il pu être autrement?). Quand c'est chanté en anglais, je me fiche pas mal des paroles, vu que je ne pige pas tout. La musique. Je suis là pour la musique, pour écouter ce qui se fait, ce qui se passe, à l'ouest comme à l'est. Alors, au moment même où j'écris ces lignes, quand un riff comme celui qui ouvre « Living On The 110 » m'a été envoyé à la gueule, je jubile, j'exulte, je pogote psychiquement. Et puis en plus, ça plaît à mon fils de 4 ans et demi (qui, au passage, aime aussi Gojira et les Dead Boys... ) ; J'aime aussi être surpris : l'intro douce-amère, tout en acoustique et finesse de « Take Me Higher ». En prime, le funk est là (« Take Me Higher », toujours), la basse est ronde et omniprésente, les riffs sont groovy, ce qui n'est pas pour me déplaire. La joie qui s'extirpe des premiers instants et du riff de « Legalize Me ». Bon sang quel fraicheur, quel sang neuf. Peu importe que le genre date, ou que rien n'ait été inventé, qu'est-ce que ça peut foutre. Ça « sent » le neuf en tout cas, le frais, l'envie de jouer, d'en mettre un bon coup dans la gueule. C'est sain, c'est propre, c'est beau. Et Morello s'amuse toujours autant avec son instrument : en témoigne le riff mélodique de « Strenght In Numbers », qui fait presque penser à une poule qui caquette, ou les solos expérimetaux, tout en technique musclée de « Radical Eyes ». Et dans tout ça, les rappeurs vocifèrent, fulminent et rugissent par-dessus ce fracas de rock - metal testostéroné, le meilleur qui soit. Incroyable à quel point la technique et le jeu des musiciens servent le flow des rappeurs (« Fired A Shot »), comme ils servaient Zach De La Rocha au temps « d'air-ATM ». En ces temps où l'on aurait bien besoin de se réunir tous, de se rassembler pour stopper l'engeance et la merde ambiante, l'album des Prophets Of Rage semble être la bande-son heureuse et bienvenue d'une révolte virtuelle qui pourrait/devrait être réelle et renverser la conjoncture actuelle. Sortez les armes, hurlez donc un bon coup. En tout cas sortez donc un peu d'argent pour acheter cette galette (je le dis rarement ça), car elle vaut son pesant de cacahuètes.

Beaucoup d'éléments du disque rappellent RATM, le phrasé des riffs bien construits, milimétrés, phrasés de guitare mathématiques, cousus main, sur le fil du rasoir, associés à une rythmique lourde, à toute épreuve, blindée, ne supportant pas d'être en arrière-plan et le faisant savoir (« Legalize Me », « Hail To The Chief », allusion à peine déguisée au « Hail To The Thief » de Radiohead).

On retrouve les montées en puissance jubilatoires (« Living On The 110 »), mémorables, emblématiques de ce que les musiciens accomplissaient en leurs temps jeunes finalement assez lointains... (1990). Parfois, des explosions d'énervements surgissent, avant de brefs moments d'accalmies. L'essouflement guette légèrement (« who owns who »), mais l'énergie est là du début à la fin, communicative, irrésistible. L'ensemble est incontestablement puissant. L'un des mes disques de l'année 2017. Un gros coup de cœur.