C'est mon album préféré de la vie. Tout est parfait du début à la fin.
Attention, séquence nostalgie en noir et blanc de ma rencontre avec cet album : un éducateur m'a un jour filé un CD gravé avec l'orthographe suivante "Relashionship of Command", vous savez l'anglais en France, c'est pas toujours facile. J'avais déjà entendu le nom de ce groupe plein de fois, mais à une époque où l'accès à la musique sur internet était encore un peu compliqué, où youtube ressemblait encore à une sorte de vidéo gag, je n'avais pas eu l'occasion d'écouter cet album. Je l'ai mis dans mon lecteur radio / K7 / CD, et paf, c'était la branlée.
C'était tout ce que j'avais cherché pendant des années, je pensais que je ne trouverai jamais un groupe qui sonnait comme je voulais, un truc violent, émotionnel, mélodique, énergique, et avec des plans de guitare de l'espace sur une rythmique endiablée. Et je tombe sur At The Drive In.
Depuis le temps que je l'écoute j'ai même affiné ma connaissance de cet album que je connais dans les moindres mesures, et que je continue de préciser encore.
Je pourrai vous dire que les plans de guitares sont fabuleux : il y a une vraie recherche d'harmonie à deux guitares, une punk un peu traditionnel rythmiquement (et c'est à nuancer encore), et la guitare d'Omar Rodriguez Lopez qui vient la compléter avec des plan mi-sud américain / mi on sait pas trop quoi.
Il y a une gestion des effets d'Omar Rodriguez Lopez qui est fantastique, on peut geeker pendant des heures pour voir quel est son pedalboard, et découvrir des pédales rares (Earthquaker Devices, vous le savez maintenant d'où vient l'intro de Invalid Litter Dept). Je soupçonne même que ce soit ce groupe qui est remis au gout du jour les amplis Orange, cette marque britannique des années 60 sur lequel n'importe quel groupe de hardcore des années 2010 joue.
Je pourrai vous dire que les textes et la voix de Cedric Bixler Zavala sont d'une richesse incroyable. Les textes sont volontairement cryptiques et laissent place à l'imagination, les images évoquées sont dingues. Quel est ce "simple bras ciseau" dont il nous parle ("one armed scissor"), pourquoi "cette station n'est pas opérationnelle" ("this station is non-operational") ? Pourquoi la boite noire nous ment ("tell us is the black box lying"), pourquoi danse-t-on sur les cendres de cadavres ("dancing on the corpses' ashes") ?
Et tous ses screams sont d'une émotion bordel. Entre le fou possédé, la rage, le mysticisme du désespoir. Je n'imagine pas le nombre de prises pour avoir la parfaite émotion au bon moment.
Je pourrai vous parler de la production qui défonce, Ross Robinson a montré qu'il maîtrisait le game du rock-metal-punk. Il l'a fait Slipknot, Korn, Deftones, que des groupes qui n'ont pas marché (MAIS NON JE DECONNE PUTAIN). Et pourtant c'était chaud à capter, car dans les année 2000, bah At The Drive-In ils sont pas connus pour jouer proprement. Quand on écoute comment ils jouaient, bah ça se désaccorde à fond, car Omar Rodriguez Lopez fait n'imp, Cedric Bixler Zavala est faux et à bout de souffle car il fait moult galipettes. C'était un petit tour de force pour que du coup l'énergie du groupe soit bien retranscrite sur CD.
Je pourrai vous parler de la session rythmique batterie / basse / guitare rythmique qui soutient le tout. En effet, avec les deux zigotos qui vont donner Mars Volta, faut rester efficace et percutant, et soutenir le machin pour pas que ça sombre dans un bordel monstre.
Je pourrai vous parler des 1000 détails de la direction artistique et de composition, de la batterie sur "Enfilade", du dialogue surréaliste qui l'introduit, de Iggy Pop qui fait les backs les plus improbables ("Manuscript Replica" répétées 725 fois sur différents tons), ...
Mais je vous invite à découvrir tout ça par vous même, et de vous laisser porter par le meilleur album de post hardcore : il y a eu un avant et un après Relationship of Command.