La machine à rêves

J'ai longtemps eu une certaine méfiance envers "Relics", j'avais cru tout ce temps que ce n'était qu'un best-off des débuts de Pink Floyd. Et, depuis "Legend" de Bob Marley (et surtout depuis que j'ai vraiment découvert cet artiste justement), je suis pas très best-off en général. Par ailleurs, on sera tous d'accord pour dire qu'on ne divise pas un disque de Pink Floyd : tu prend l'objet musical totalement, tel qu'il est, ou tu l'écoute pas. Et puis, en connaissant bien la discographie du groupe, j'ai vu qu'il y avait aussi, dans sa tracklist, des titres qui n'étaient pas dans les albums... Et puis une version studio d'un titre que je connaissais déjà en live... C'est quoi ce fourre-tout ? Et en plus non autorisé... Cet album est ovniesque. Et magnifique. Une magnifique surprise.
"Arnold Layne" et "See Emily Play" sont des bijoux tellement beaux que je regrette qu'ils n'aient pas été sur leur premier album : il en aurait été salutaire pour ce dernier, qui manquait selon moi de grandes chansons marquantes. Mais nous retrouvons de "The Piper at the Gates of Dawn" deux titres : le fameux "Interstellar Overdrive", avec le rajout d'un effet stéréo qui donne le tournis comme conclusion (à écouter dans un état second rien que pour ça!), et le bon "Bike". "Remember a Day" est le seul représentant de "A Saucerful of Secrets"... Sans doute parce qu'il est certifié que Barett joue de la guitare sur ce titre. Certes, je kiffe cette chanson, mais pourquoi ne pas avoir sélectionné "Jugband Blues" ? Niveau symbolisme, niveau esprit de compilation, niveau cohérence aussi, ça aurait été génial d'inclure ce titre ! L'ombre de Syd Barett, bien entendu, plane, même lorsqu'il n'a pas de rapport avec l'album abordé. Même "More" : quand j'entends "Cirrus Minor" (la deuxième meilleure chanson, après "Cymbaline" du disque original qui ne m'a jamais transcendé), je ne peux m'empêcher de penser à lui, c'est inexplicable. Par contre, "The Nile Song" me fait parfaitement rien. C'est pas désagréable, c'est juste que je m'en fous de son existence.
Voilà pour les albums ! Quant aux inédits, on alterne entre le bon et le magnifique. "Julia Dream" est ma tarte aux pommes à moi : une merveille totale. Quand Waters était derrière et Gilmour devant, ça rendait vraiment les sommets du Floyd... "Paintbox" déchire également ! Pour le bon, "Biding My Time" met en valeur le futur bassiste paranoïaque. Sa mélodie est inoubliable, ses arrangements à la hauteur. Enfin, là où la déception se pointe enfin un peu, c'est pour la version studio de "Careful with that axe, Eugène". Le morceau est majestueux : que ce soit la version d'"Ummagumma", de Pompéi ou la Best version de 1972 (https://www.youtube.com/watch?v=rov-STc48FA : c'est de la bonne, foncez !), ce morceau est juste transcendantal ! Mais en studio, il n'y a plus rien. Plus d'intensité, trop carrée, c'est comme si le "The End" des Doors était raccourci : l'intérêt se dissolve, forcément. Même le cri de Waters fait faux...
Objet délicieusement bizarre (rien que sa pochette pose des tas d'interprétations et de pirateries en tout genre !), "Relics" est un regard nouveau sur les débuts des Pink Floyd. On ne peut que se demander, après son écoute, qu'est-ce qu'aurait été le groupe si Syd Barett serait resté leur leader, et surtout, si la musique du groupe n'aurait pas joué un rôle dans sa folie, tel le premier leader de Can ?!