Rock ’n’ Roll Star!
6.9
Rock ’n’ Roll Star!

Compilation de David Bowie (2024)

OK, l’objet est franchement onéreux mais il est superbe pour les fans : un magnifique livre de plus de 100 pages sur du papier de qualité avec textes et photos, chaque morceau expliqué et des articles de 1972 par exemple du NME. 5 CD et un Blu-ray audio sont glissés à l’intérieur. Attention, la plupart de ces titres figurent déjà dans des CDthèques « bowiennes » bien remplies. Avec le livre, le plus fascinant est le fac-similé du cahier sur lequel Bowie écrivait ses paroles (voir celles de « Moonage Daydream »), ses croquis, avec des ratures, là, on est en plein dans le processus créatif et on comprend mieux sa façon de travailler, de construire ses morceaux. On assiste pratiquement en direct à la naissance de l’avatar de Bowie ou son alter-ego, le fameux Ziggy Stardust. Ziggy ou comment, après avoir été un chanteur folk à ses débuts, se réinventer en créant un personnage totalement hors-norme qui va lui permettre de briser les codes (masculin/féminin, humain/alien…). Le 10 février 1972, David Bowie donne un concert au Toby Jug de Tolworth, dans le sud-ouest de Londres, qui marque le début de la tournée Ziggy Stardust. Aux côtés de Mick Ronson, le vrai maître d’œuvre du son du groupe et fantastique guitariste, se trouvent Trevor Bolder et Woody Woodmansey, devenus les Spiders from Mars. Le chanteur apparaît sur scène dans un costume extravagant, les cheveux teints en rouge foncé. Il incarne le personnage de Ziggy Stardust, un extraterrestre descendu sur Terre pour devenir une icône du rock. IL finit par être piégé par les excès du rock qui le détruisent. Bowie lui-même derrière l’histoire un peu tordue, a reconnu que le personnage qu’il avait créé était simpliste. Son image s'inspire de Vince Taylor, un rockeur britannique sulfureux et sous-estimé (qui a fini par croire qu’il était un croisement entre un dieu et un extraterrestre !), et du modéliste japonais Kansai Yamamoto, tandis que son nom est en partie repris au Legendary Stardust Cowboy, pionnier américain du psychobilly. Ajoutons à cela le mime auquel Bowie a été initié par Lindsay Kemp quelques années auparavant et voilà, ce personnage improbable était né !

Durant les six mois qui suivent, Bowie se produit dans tout le Royaume-Uni devant un public toujours plus nombreux et enthousiaste (le public américain va avoir lui plus de mal à accrocher). En combinant le hard rock de « The Man Who Sold the World » et la pop plus légère de « Hunky Dory », l'album « The Rise and Fall of Ziggy Stardust and the Spiders from Mars » participe à la création du courant glam rock avec T. Rex, le groupe de Marc Bolan. Il sort au mois de juin 72, deux mois après le single « Starman ». Dans les CD, seul le 5e est véritablement inédit donc le plus intéressant avec des versions alternatives des titres de l’album car les autres titres (en particulier pour les collectionneurs) sont déjà connus, par exemple dans le « Live at the BEEB ». Il s’agit de demos, de morceaux enregistrés pour la BBC avec des John Peel Sessions de 1972 ou encore celle de Bob Harris. Sur le CD 4, quelques titres enregistrés en concert à Boston le 1er octobre 72 ont été ajoutés (dommage que le concert intégral ne soit pas présent). Le Blu-Ray audio contient différents mixes à condition d’avoir l’équipement nécessaire. Le succès a été phénoménal pour Bowie, c’était ce qu’il voulait, devenir une rock star planétaire. On a même parlé à l’époque de véritable « Ziggymania » comme il y avait eu une « Beatlemania » 10 ans avant. Mais avec le succès, son personnage a fini par l’envahir et l’étouffer, l’artiste et sa créature finissant par se confondre, sur fond d’excès de plus en plus lourds. Sa santé mentale finit même par être en jeu.

Au bout de 18 mois à tourner sous le nom de Ziggy Stardust, Bowie n’en peut plus. En juillet 73, Bowie commençait également à atteindre un point d'ennui créatif et sentait qu'il ne pouvait plus interpréter Ziggy avec le même enthousiasme. Il y avait aussi des raisons commerciales derrière sa décision de retirer le personnage : la maison de disques de Bowie, RCA, refusait de financer une troisième grande tournée américaine en raison des dépenses excessives de la direction de Bowie de plus de 300 000 $ lors des tournées de 1972 et 1973, ainsi que des ventes de disques décevantes aux États-Unis, le personnage restant très clivant là-bas, son côté androgyne et la sexualité assez débridée qu’il représentait faisant tordre le nez au grand public « bien-pensant » et conservateur, surtout dans le sud du pays. La fin de Ziggy est survenue à l’issue du concert de l’Hammersmith Odeon à Londres le 3 juillet 73, la prestation magistrale a été filmée et enregistrée, elle existe en CD et en Blu-ray et avant le dernier titre, « Rock’n’roll Suicide », il annonce : « C'est le dernier spectacle que nous ferons jamais ». Le public comme les critiques, très surpris, ont cru que Bowie mettait fin à sa carrière mais il n’était question que de laisser Ziggy au placard…pour se créer maintenant d’autres avatars (The Thin White Duke…). Bowie ou la transformation continue.

JOE-ROBERTS
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le 21 sept. 2024

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