1 X 6 X 2 X 3 = 36

Qu’est-ce qui leur a pris ? 1 album, 6 morceaux par face, 2 faces, 3 vinyls, ça donne 36. Magie ! 36 morceaux. C’est l’album triple. Il y avait largement de quoi faire un bon album des Clash, en retirant tous les morceaux inutiles, plan-plan, qui font traîner la cadence pour rien. A commencer par Hitsville UK, et tous ceux qui suivent le DISC ONE. Je l’ai écouté version CD. DISC ONE : 18 + DISC TWO : 18 = 36. Sauf que la fièvre créative c’est bien, mais ça ne donne pas que du bon. Le problème de la création c’est qu’il faudra nécessairement trier, faire des choix, et eux, ils fourrent tout dans l’album, leur triple album. Un vrai triathlon, ce triple, tellement c’est long, ce trip. C’est déjà un exploit de le tenter, vu les réticences des maisons de disques. Quand on leur annonce qu’on veut faire un double album, ils flippent, alors un triple, c’est …révolutionnaire. A condition de le remplir avec de la musique qui en vaille la peine, à condition de ne pas s’épuiser en route ; Et là, j’ai des doutes.

Ça démarre FORT, avec le disco-punk The Magnificent Seven. Sacré groove, mélodie minimale, maximum d’efficacité, un morceau qui entre dans le crâne, pour ne plus le quitter. Après, ça descend d’un cran, voire de deux, le reste est loin d’être à la hauteur, beaucoup moins inspiré. Passer d’un style à l’autre, ce n’est pas nouveau, mais c’est risqué, car ça fait produit placé en tête de gondole. On passe du ska, à du rock rockabilly, punk, reggae, et j’en passe, les expérimentations ne manquent pas. Il y a même un calypso-rock !

Quand ça revient au rock binaire, ça fonctionne mieux. Police On My Back, ou Midnight Hog. Bon, ils adorent le reggae, ça se sent, et ça s’entend. Ils n’avaient qu’à faire un album reggae, ça aurait été plus cohérent, plutôt que de passer tout le temps du coq au veau, à l’âne, au coq. On a un esperanto punk à l’arrivée. The Equaliser, c’est un dub tout droit sorti de Kingston, qui ne change en rien de ce que n’importe quel groupe de roots rock reggae ferait à l’époque. Et il y en a plein comme ça. Beaucoup d’influences, toutes survolées, jamais réellement appréhendées, pas digérés dans leur essence même, donc les morceaux restent en surface, des copies de copies de tel style, tel autre style…

Ce qui manque à ce triple effort, c’est une vraie âme. Un truc qui dépasse la simple provocation créative, l’inspiration qui nous sautait à la figure avec le morceau d’introduction. Après ils se dispersent, et nous ennuient vite. Quand on aborde autant de styles différents, autant les fusionner et faire un truc vraiment neuf, ou alors avoir des compositions au-dessus de la moyenne. Les expérimentations hasardeuses comme Mensforth Hill, on s’en passerait. Par moments la rage créative touche juste, comme avec le superbe Version City, un rythm and blues, plus groove tu peux pas, curieux morceau d’ailleurs, coincé, entre deux dubs, et quelques autres titres très variété. Silicon On Sapphire, morceau instrumental, aux sonorités à la Star Trek, ou Career Opportunities, chanté faux ( !) par un groupe de petits chanteurs pas entraînés. Je veux bien que se soit punk, mais de là à tout accepter sous prétexte que…A vouloir trop en faire, on voit leur bonne volonté, mais aussi leurs gros défauts. La moitié, (restons gentils) des morceaux, n’est pas assez développée, pas assez pour prendre place sur un album.