Un album qui arrache la tête...
Groupe fort sympathique que ces petits floridiens de Trivium! Le metal des années 2000 made-in USA est assez "hollywoodien". Comprenez par-là qu'il essaie souvent d'en mettre plein la vue avec une énergie débordante, mais surtout rafraîchissante. Au risque parfois de passer pour une musique de demeuré congénital, notamment en ce qui concerne le Metalcore (Bullet for My Valentine par exemple et le clip ridicule de Waking the Demon...) Mais il serait de bien mauvais aloi que de résumer ce sous-genre à BFMV qui, quand il veut, peut sortir autre chose que du Metalcore prout-prout. Bref, on a souvent une image un peu trop erronée du metal moderne, surtout celui qui nous vient des States. Un single aura tôt fait de passer sur MTV ou autre, et de conquérir le premier venu. Bref, vous l'aurez compris, Trivium est un groupe qu'on aime critiquer parmi ceux qui se considèrent dans "l'élite" des metalleux, car c'est une cible facile! Je l'avoue honteusement, il m'est moi-même arrivé de les critiquer aveuglément pour "faire comme l'élite", comprenez par-là que j'ai dit de grosses conneries.
Car voilà, Trivium est pour moi un futur groupe de légende, de la trempe des "héros" des années 80, à savoir les Maiden, Metallica et cie... Rien que ça! Après s'être pris pour les Four Horsemen sur leur précédent méfait "The Crusade" (2006), nos floridiens sont de retour en 2008 avec "Shogun", probablement l'album qui divise le plus les fans comme les amateurs. En effet, Trivium, nous a toujours gratifié d'une technique incroyablement précoce (Les albums "Ember to Inferno" (2003) et surtout le très populaire et néanmoins excellent "Ascendency" (2005) alors que les membres n'avaient même pas 25 ans ont impressionnée la presse et le public) et d'une patte mélodique des plus appréciables. Les codes du Metalcore sont bien-là, à savoir, une alternance de chant crié/clair, gros riffs en veux-tu en voilà, et une rythmique musclée et rapide. Sauf que Trivium dépasse ce stade pour le moins "clichésque" et décidé d'associer à cette recette, les principaux attributs du Thrash Metal made-in Metallica. Et le résultat s'avèrera être le bon pour la bande à Heafy, car de nombreux adeptes y trouveront leur compte.
Cependant, de par sa jeunesse, Trivium tâtonne quelque peu, peine à trouver son rythme de croisière, et "Shogun" est un parfait exemple de ces balbutiements juvéniles. Pourtant, l'album commence de manière tout simplement magistrale avec deux morceaux quasiment parfait sur le plan structurel et technique. "Kirisute Gomen" et "Torn Between Scylla and Charybdis" sont deux joyaux du répertoire des floridiens. Une grande puissance se dégage de ces deux morceaux, disposant chacun de moments particulièrement jouissifs (Introductions très originales, changement de rythmes cohérents, des refrains extrêmement accrocheurs, un solo de basse pendant le pont de "Torn..."). En bref, deux morceaux originaux et dont Trivium à le secret.
Passé ces deux morceaux d'anthologie, nous voici arrivé au très populaire "Down From the Sky" THE single de Trivium, probablement le titre de plus apprécié des fans lors des concerts du groupe. Cette fois la structure du morceau est beaucoup plus basique, et les innovations sont moins présentes... Mais qui à dit que c'était un défaut? Le manque d'innovation est très largement compensé par une grande efficacité, un refrain mélodique à souhait, un pont agressif mais racoleur (Ce jouissif "ANNIHILATE"!!)... Là encore Trivium fait plaisir à son audience, et ne commet pas le moindre faux-pas.
La suite nous emmène vers deux autres singles tirés de l'album "Into the Mouth of Hell We March" et surtout "Throes of Perdition". Commençons par le premier nommé, qui est une sorte de "sous-Down from the Sky", dont les avis sont très partagés. Certains trouvent le morceaux complétement niais, d'autres diablement efficace. Ce qui résume finalement assez bien l'album mais nous y reviendrons. Parlons plutôt de "Throes of Perdition", un autre grand titre de Trivium, probablement une de leur meilleures compositions... Le thème est assez analogue à "Hallowed Be Thy Name" d'Iron Maiden (il y a pire comme référence!) mais l'angle sous lequel il est abordé est différent. Toutefois, d'un point de vue musical, ce morceau nous fait passer un très bon moment. Amateurs de puissance et de mélodie fougueuse, ce morceau est pour vous, il ne s'arrête et ne s'essouffle jamais... A écouter sans modération!
Mais voilà, après, c'est le drame! Nous arrivons dans ce que j'aime appeler le "ventre mou" de l'album... Il faut croire que le capital inspiration du groupe était déjà bien trop entamé à l'issu de ces 5 premiers titres, et il faut avouer que la suite jusqu'au titre final nous laisse sur notre faim. Comptez un morceau dont on le croirait sorti des enregistrements de "The Crusade" (le chant gueulé en plus) avec "Insurrection", le reste est plutôt fade et sans trop d’intérêt. Bien sur, ces morceaux disposent de quelques moments intéressants, mais pas suffisants pour retenir l'attention. Manque de génie, d'idée, de fougue.
Alors dans ces cas-là, pour que l'album ne pâtisse pas trop de ce manque de cohésion, il nous faut un titre sublime, qui arriverait en sauveur. Et heureusement il est là. Le titre qui donne son nom à l'album "Shogun" est un véritable chef d'oeuvre, qui démontre que l'inspiration de Trivium va bien au-delà que ce que nous propose bien des groupes à l'heure actuelle. Bien qu'il faut reconnaître que Trivium s'inspire des plus grands pour composer, ce qui est loin d'être un mal, il faut aussi avouer que ce groupe sait apposer sa patte et son empreinte pour satisfaire son auditoire. Et le groupe d'Orlando n'en est pas à son premier morceau "épique" ("Declaration" sur "Ascendancy", l'instrumentale "The Crusade" sur... "The Crusade"). Mais celui-ci est très certainement le plus abouti, et de loin. Les changements de rythme ne cessent de nous mettre en haleine, le refrain est d'une beauté à pleurer, et le solo de blues (!) au milieu de la chanson une vraie surprise enchanteresse. Le pont qui se termine par une GRANDE montée en puissance nous montre que nous assistons-là, à quelque chose de grand. En petit bonus, remarquons que le refrain reprend en fait la petite mélodie acoustique qui introduit "Kirisute Gomen" ce qui permet de boucler la boucle et de conclure l'album sur une note magistrale.
Précédemment, je disais que les avis sur "Into the Mouth of Hell We March" étaient très partagés, à l'image de l'album, et j'étais loin d'avoir tort! "Shogun" a suscité beaucoup d'attente chez la presse spécialisée et les fans, Trivium est considéré comme un groupe majeur de la scène metal moderne. Et ce "Shogun", peine à trouver une identité, et une certaine homogénéité. Le groupe à enregistré cet album sous une grosse pression, et l'enregistrement fut parfois pénible comme a pu le confier Matthew Heafy lors de ses interviews. Fallait-il faire un "Ascendancy 2?" Fallait-il se débarrasser du travail accompli sur "The Crusade"? Cette pénibilité aura d'ailleurs pour conséquence le remerciement du batteur Travis Smith. Pour en revenir à "Shogun", il serait, malgré le milieu plutôt faiblard de l'album, de passer à coté de celui-ci, ne serait-ce que pour son titre final, et de ses nombreux "classiques", qui jalonnent désormais les set-lists des concerts de Trivium. Et ce qu'il y a de bon avec ce groupe, c'est que, malgré les faux-pas du disque, on sait que c'est un groupe sur lequel il faut compter pour l'avenir, et leur prochain album "In Waves" ne fera que confirmer tout le bien qu'on pense d'eux. La route est encore longue, et "Shogun" est une étape qui mérite qu'on s'y arrête un moment!
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