Après un The 2nd Law auto-produit qui poussait l'expérimentation de Muse toujours plus loin et qui divisait toujours plus les fans du groupe, mais qui, sur le long terme et avec du recul, montre sa valeur; après un Drones produit par Robert Lange et qui promettait un retour aux sources du trio anglais, mais qui manquait vite de fond, et après une phrase d'introduction beaucoup trop longue à cette critique, Muse revient avec son huitième (déjà) album.
Depuis quelques mois, les fans, qu'ils ou elles soient adeptes de l'ancien Muse ou du nouveau (ou même des deux), grincent des dents. Un single sur deux manque de fond, certains datant d'un an et demi avant la sortie de l'album. Malgré le retour de Rich Costey, producteur de la sainte trinité Origin of Symmetry, Absolution et Black Holes, le délire rétro assumé peine à convaincre, et la myriade d'éditions de l'album jugées trop chères n'aident pas.
Mais au final, après une mise en place plus que chaotique, que vaut-il, ce Simulation Theory ?
Le LP de Matthew et Cie débute sur Algorithm; qui fait un magnifique job en tant que track d'ouverture. Les synthés rétro et assez sombres font accrocher direct, et on retrouve vite les harmonies classiques qui ont fait une partie du charme d'Origin et Absolution, sans parler du piano.
The Dark Side continue sur la bonne dynamique du début d'album; Bellamy retrouve des capacités vocales inutilisées depuis quelques années (on va d'ailleurs noter que sur tout l'album, il y a vraiment cette impression d'entendre le Matt Bellamy de 2006 chanter). Les synthés se font encore une fois présents, mais pas plus qu'à leur habitude, puisque Muse a toujours utilisé des sonorités électroniques depuis Origin of Symmetry. Le solo rappelle d'ailleurs pas mal celui de Darkshines.
Et puis Pressure. Bien que sympathique, elle casse légèrement la dynamique de l'album de la même manière que Supermassive Black Hole l'avait fait sur Black Holes & Revelations, en proposant une track avec des tonalités hard rock néanmoins accessibles, le tout dans un délire plutôt décalé, d'où le parallèle.
Propaganda, premier hic pour la plupart de l'auditoire qui sera déstabilisé par l'intro beaucoup trop violente, et la façon R'n'B de chanter. On peut pas dire que ça m'a personnellement dérangé, les chœurs font bien le travail et même si le R'n'B n'est pas le fort de Matt, il a eu le temps de pratiquer depuis Undisclosed Desires. Les effets sur le solo le rendent aussi diablement sympa à écouter et la bassline de Wolstenholme lie le tout vraiment bien.
Break it to Me, là aussi avec des tonalités hard rock et R'n'B, mélangeant un peu tout mais en arrivant à intégrer un truc totalement nouveau pour le groupe : des sonorités un peu orientales, toutes faites de demis-tons.
Ça marche plutôt bien, jusqu'ici la composition et la production sont vraiment agréables, les puristes (ou même les autres) tireront la gueule, mais c'est indéniable que Muse s'est vraiment éclaté sur la composition de ces pistes, même si on peine vraiment à repérer le délire rétro si présent sur les artworks.
Matthew décide ensuite de devenir Ed Sheraan, et accouche de Something Human, enfant mal formé d'un vide de composition intersidéral et d'un clip qui rappelle les premières heures de la PS2. En tant que single, elle faisait l'unanimité pour sa médiocrité, c'est toujours pareil à l'intérieur de l'album.
Se lance après Thought Contagion, réprimée par beaucoup pour son manque de composition. Même si encore une fois, j'ai été emballé par le morceau, il faut admettre qu'il souffre du même syndrome que la moitié de Drones : un bon riff, deux trois variations, qui marchent bien, mais utilisés jusqu'à la corde. Ça fera un bon anthem en live ceci dit.
Bien, Get Up and Fight. Tellement pas emballé par ce son la première fois, je dois avouer que je peux pas fournir une vraie critique, vu que globalement, j'ai pas du tout envie de la réécouter. Plus ou moins les mêmes sonorités que Revolt, mais en moins bien. Le sample mal foutu fait très cringe tout de suite et on a vraiment, vraiment envie de se ruer sur le bouton Next.
Vient ensuite Blockades, qui, même si très bonne, vient après Get Up and Fight, l'auditeur ou l'auditrice est encore en plein choc émotionnel. Ironie à part, c'est encore une fois une track très bonne qui reprend la dynamique de Propaganda et Break it to Me, mais le mal est fait, après trois pistes faibles, on est un peu perdu.e.s. Ça pourrait passer inaperçu dans la tracklist de Black Holes & Revelations ceci dit.
Dig Down. Un single sorti il y a près d'un an et demi, qui était franchement faible à l'époque. Paradoxalement, elle fait moins tâche que Thought Contagion (sortie 8 mois avant l'album), et retrouve de la puissance une fois dans l'album.
Enfin, The Void, piste de close. Malgré encore une fois une bonne composition, des harmonies plaisantes, elle s'éternise beaucoup trop, et laisse sur une note amère.
Ça serait plutôt bête aussi de ne pas mentionner les bonus tracks, mais vu qu'il s'agit de versions alternatives, on va pas s'y attarder ; cependant Algorithm VR sonne encore plus théâtrale et ça passe vraiment bien. The Dark Side VR, à la manière de Hyper Condriac Music, reprend la chanson de manière plus posée, encore plus sombre, et c'est génial à entendre. Les versions acoustiques de Something Human, Propaganda et The Void, bien que toujours sympas, ne proposent pas de redécouvrir les morceaux sous un autre angle, puisqu'on a juste remplacé les guitares électriques par des acoustiques, how original (sauf peut-être pour The Void). On notera quand même la version Gospel de Dig Down qui, même si ça semble totalement absurde au premier abord, est vraiment agréable et redonne un second souffle à la track d'origine.
Au niveau des textes, ce n'est un secret pour personne que Bellamy n'est pas le plus grand parolier, ni le pire; tout comme la composition, l'écriture varie en fonction des pistes, mais elle n'arrive vraiment à faire remuer la cervelle de l'auditeur ou l'auditrice. C'est toujours moins cringe et cheesy que sur Drones et The Resistance ceci dit.
En résumé, on a du mal à voir ce qu'ont voulu faire Muse et Costey. Le délire rétro assumé dans la campagne promotionnelle n'est absolument pas là, à l'exception de quelques synthés et rythmes. La moitié des pistes manquent de fond, et celles qui en ont, malgré qu'elles témoignent d'une vraie éclate de la part du groupe, feront grincer les puristes.
Avec les singles sortis trop tôt et écoutés par la plupart jusqu'à l'os, certaines pistes perdent de leur puissance et c'est dommage. Sans aucune idée de ce qui s'est réellement passé derrière le rideau, Simulation Theory restera sûrement considéré comme le pire album de Muse pour la plupart.