Bon, les amis, soyons un peu sérieux : je sais que parmi vous il y a de grands fans des Stones, il y a même des sourds et quelques personnes d'une mauvaise foi intégrale. Tous des gens qui parlent de "Some Girls" comme s'il s'agissait d'un "grrrrand disque" de rock. Si ça peut vous faire plaisir, ne vous gênez pas pour moi, mais quand vous en avez assez de faire semblant, vous savez bien que les Stones ont arrêté de faire de "grands disques" de rock avec "Exile on Main Street". Et qu'en 78, année bénite où la bonne musique pétait dans tous les sens, nulle personne qui avait encore la moitié du cerveau fonctionnelle n'écoutait le "dernier Rolling Stones". On se foutait tous comme de notre première blenno du "scandale" des paroles de "Some Girls", le genre de truc (bâillement) qui agitait plutôt "Paris Match" que "Sounds"...
Maintenant il y a plein de révisionnistes qui réécrivent l'histoire, pour justifier de ne pas avoir été avec nous aux premiers concerts de PIL, des Stranglers, de Costello ou de Magazine. Sans même parler du Boss qui venait de nous pondre "Darkness on the Edge of Town" ou de Patti avec son "Easter" egg. Honnêtement, les ennuis de Kifff avec la justice et le fait que Jagger se tapait la femme de Bryan Ferry... soyons un peu sérieux (again...) !
Donc les révisionnistes prétendent que Jagger et Richards voulaient donner ici une leçon de punkitude aux punks : eux, ils sniffaient de la coke avec le POTUS ! Et ils étaient toujours énervés. Le problème, évidemment, c'est que, sur "Some Girls", quand les Stones jouent "énervé", c'est un peu n'importe quoi, et guère plus cohérent que le pire groupe punk amateur dans un pub de Chelsea Road.
Bon, 40 ans après, on n'a plus de raison de se fâcher : la suite de la discographie des Stones est une catastrophe industrielle, et on ne peut que se sentir embarrassé devant les éternelles tournées gérontophiles du euh... "groupe". Du coup, "Some Girls" passe facilement pour un bon album quand on le remet en perspective...
...Mais sûrement pas quand les Stones font semblant d'être encore pertinents. Plutôt quand ils font de la disco ("Miss You" reste très bien, contre toute attente), du country ("Faraway Eyes") ou de la soul sirupeuse ("Beast of Burden"). Une exception quand même : "Shattered", morceau azimuté et délabré, où Jagger est formidablement crédible quand il singe la décadence épuisée d'une existence urbaine vide de sens. 5 ans plus tôt, les Stones auraient fait un chef d'oeuvre de cette chanson. En 78, elle leur permet de surnager.
Pas pour longtemps.
[Critique écrite en 2018]